Sagrada Familia : la main de Dieu sur Antoni Gaudi

Antoni Gaudi (1852-1926), surnommé "l'architecte de Dieu", voulait un temple parfait à Barcelone. Plus de 140 ans après, le prodige semble s'être accompli : la basilique inachevée de la Sagrada Família (Sainte Famille), financée uniquement par des dons et prisée par 20 millions de visiteurs, est couronnée comme "le plus beau bâtiment au monde", avec "l'intérieur le plus remarquable", et bientôt "la tour la plus haute".
Conçue comme "une Bible en pierre", chaque coin de la basilique, aussi petit soit-il, renferme un caractère symbolique, dans un lien sublime entre ciel et terre, entre art et liturgie. La nature et la lumière sont sublimées, comme surnaturelles, et nul doute que Dieu est omniprésent dans les reflets, les courbes, les couleurs toutes créées à Son image. Le pape Benoît XVII a consacré la Sagrada Familia en 2010 comme le chef-d'oeuvre unissant "beauté des choses" et "Dieu comme la Beauté", et qui rayonne dans le monde entier en éclairant aussi bien les fidèles que les non-croyants.


Église expiatoire, la Sagrada Familia est aussi une imitation de l'histoire de Jésus-Christ, né à Nazareth, pays "du néant", et qui avec le temps, se révèle être le centre du monde comme de l'histoire. La tour de Jésus-Christ est la dernière structure à devoir être construite pour achever la célèbre basilique de Barcelone.

Cette tour sera la plus haute : elle mesurera 172,5 mètres et sera couronnée d'une croix géante pouvant accueillir 11 personnes. Son inauguration officielle, en 2026, coïncidera avec le centenaire de la mort d'Antoni Gaudí, d'ores-et-déjà déclaré vénérable par le Pape François le 14 avril 2025 qui a reconnu ses vertus héroïques, et dont la canonisation est désormais instruite à Rome.
Découvrons quelque peu à présent cette merveille de Dieu !
I. SAGRADA FAMILIA : "L'INTÉRIEUR LE PLUS REMARQUABLE DU MONDE"
1/ Une structure intérieure révolutionnaire
La forêt spirituelle conçue par Gaudi pour offrir aux fidèles une ambiance de prière et de recueillement à l'intérieur du temple représente l'apogée technique et artistique de l'architecte. Inspiré par les grandes cathédrales médiévales, Gaudi proposa pour la Sagrada Familia de réinterpréter le style gothique en tant que concept nécessaire pour symboliser l'union étroite entre le Ciel et la Terre à travers la hauteur et la lumière.

Pour ce faire, les murs devaient être garnis de grandes fenêtres et, par conséquent, ne devaient pas supporter le poids de l'édifice. C'est ainsi qu'il trouva - apr!ès de nombreuses années d'études - la solution des colonnes structurées en arbre, un système innovant et jamais utilisé jusqu'alors, où les charges se transmettent à travers les ramifications, des colonnes jusqu'au sol.

Les nombreuses colonnes qui forment l'intérieur de la basilique créent une atmosphère de contemplation unique qui invite à la prière et au recueillement. Comme une grande forêt où la structure de colonnes, de voûtes et de plafonds imiterait les arbres avec les troncs et les branches, et au-dessus, le feuillage à travers lequel filtrent les rayons du soleil.

Cette solution innovante était destinée à créer une ambiance transcendante d'oraison et de méditation, mais aussi à provoquer le contraste avec le niveau du sol, où Gaudi opta pour une structure traditionnelle à cinq nefs. Fidèle aux enseignements de la nature, deux ans avant sa mort, en 1924, il réussit à relever le défi de concevoir une colonne qui éviterait l'utilisation des contreforts dans les murs : la colonne arborescente.

C'est pourquoi Gaudi rejeta la verticalité rigide de l'architecture classique et conçut des colonnes qui s'inclinaient avec la hauteur, afin d'absorber de façon optimale les charges provenant du plafonds. Le secret réside dans la rotation du fût dans deux directions - comme pour les arbres - pour obtenir plus de résistance et dans la ramification de la partie supérieure en petites colonnes pour que celles-ci supportent les voûtes des nefs.

Le plafond interne, léger et très perméable à la lumière, est une version somptueuse de la voûte cloisonnée catalane. Cette technique de construction traditionnelle est réalisée normalement à partir de brique pleine, mais pour la basilique, elle fut réalisée avec du béton armé pour les nefs latérales - formant une conception étoilée - et avec des dalles en céramique pour la nef centrale, créant une configuration hélicoïdale similaire aux feuilles de palmier.

Finalement, l'intérieur de la basilique est consacré à l'exaltation de l'Église universelle et décrit deux chemins qui se croisent : la voie de l'Humanité (Via Humanitatis) - symbolisée par la ligne qui va de la porte de la façade de la Gloire jusqu'à l'abside - et la Voie de Jésus-Christ, qui illustre la vie de Jésus de son incarnation jusqu'à sa mort et sa résurrection, et qui s'étend de la façade de la Nativité jusqu'à celle de la Passion. Le tout formant une croix éblouissante.

2/ L'obsession de la lumière
L'une des préoccupations majeures de Gaudi au moment d'alléger les murs et les voûtes du temple était de permettre à la lumière - symbolisant la présence de Jésus-Christ - d'entrer à l'intérieur de la basilique à travers de multiples ouvertures. La solidité de la structure portante permit de pratiquer dans les voûtes de grandes lucarnes formées par les hyperboloïdes qui, unies aux énormes ouvertures pratiquées dans les murs, éclairent l'intérieur de manière harmonieuse et uniforme.

Les diffuseurs imaginés par l'architecte pour couvrir ces grandes ouvertures sur le plafond filtrent la lumière naturelle et apportent une atmosphère idéale de recueillement et de prière dans l'espace des nefs. Ainsi, les offices vespéraux sont accompagnés d'un éclairage se rapprochant le plus possible en quantité, qualité et nuances à la lumière naturelle qui pénètre dans la basilique durant la journée.

Au bout du compte, on parvient à un jeu de lumière époustouflant grâce aux vitraux de Gaudi, sans doute les plus connus du monde. Une symphonie de couleurs et de lumières étincelantes qui donne à la basilique des allures de paradis. "Le temple de la lumière harmonieuse", comme il aimait tant à le rappeler.

Eusebi Vila connait bien ces vitraux puisque son père, Joan Vila-Grau, avait dessiné ceux qui ont été posés dans la nef en 2001. "Mon père a dessiné et pensé toute l'organisation des vitraux et des couleurs en fonction des vitraux et des couleurs selon le mouvement du soleil. Ça commence par le lever du soleil avec des tonalités bleues, froides, puis il va évoluer chromatiquement vers la mi-journée et il termine avec des tonalités chaudes, qui sont celles de la lumière du coucher du soleil."

Le point central de la construction est constitué par les magnifiques vitraux, dont certains s'étendent sur plus de deux étages. Ils sont conçus pour attirer le regard vers le haut et encourager la contemplation du divin. Gaudi déclarait : "Le soleil est le meilleur peintre." Il défiait le style traditionnel des cathédrales gothiques, qui mettait l'accent sur les vitraux comme principale source de lumière. Dans la Sagrada Familia, il a d'abord envisagé d'utiliser le trichrome, un système de vitraux qui utilise trois couleurs pour créer un effet spécifique, puis il a utilisé du verre au plomb qui avait plus de 600 ans d'expérience.

Gaudi a cherché à créer un contraste maximal avec des vitraux plus transparents au sommet, illuminant les mosaïques et les voûtes dorées. L'inspiration pour les vitraux est venue du monde naturel. Des couleurs chaudes comme le jaune et l'orange évoquent les levers de soleil, tandis que les bleus et les verts plus froids reflètent la mer. Ce lien avec la nature distingue encore davantage la basilique de l'iconographie souvent plus rigide des vitraux gothiques.

Les reflets de la lumière créent une atmosphère presque surnaturelle. "La vue est le sens de la gloire, car la gloire est la vision de Dieu. La vue est le sens de la lumière, de l'espace, de la plasticité. La vision est l'immensité, elle voit ce qu'il y a et ce qu'il n'y a pas." (Antoni Gaudi) C'est ainsi que chacun des vitraux correspond à un thème iconographique différent, compte tenu de leur orientation et du type de lumière qu'ils reçoivent. Les effets de lumière dans le temps sont donc différents, ce qui donne une explosion de couleurs intérieures selon l'heure de la journée.

La lumière de la Sagrada Familia s'intègre donc parfaitement à l'édifice, tout en lui donnant un sens, puisqu'elle parient à la fois à éclairer l'église et à la doter d'allégories spirituelles à l'aide de vitraux colorés capables de créer de grands effets émotionnels chez les visiteurs de l'église. La façade de la Nativité profite ainsi de la lumière de l'aube pour simuler la naissance de Jésus. La passion, il la reçoit au coucher du soleil, symbolisant la mort de Jésus. La façade de la Gloire, quant à elle, produit un effet d'illumination perpétuelle tout au long de la journée, symbolisant la résurrection.

L'un des génies de la conception architecturale de Gaudi peut être vu dans toute sa splendeur si l'on visite la basilique au moment du solstice d'hiver. À cette époque de l'année, les rayons du soleil sont pratiquement horizontaux, pénétrant à l'intérieur de l'église perpendiculairement aux vitraux, et créant un merveilleux effet de lumière composée de couleurs rougeâtres, provoquant une grande flambée de chaleur à l'intérieur du temple.

Un autre des effets que l'on peut observer à cette époque de l'année est la façon dont les rayons du soleil traversent les 60 mètres de la largeur de la nef pour atteindre les fenêtres de la Sagrada Familia, avec ses vitraux sur la façade opposée. le contraste des couleurs produit par le mélange des nuances de vert et de bleu est l'une des choses les plus impressionnantes qui se produisent. Un spectacle similaire peut être observé sur la façade de la Nativité pendant les deux semaines entourant le solstice d'été. Tout en réalité dans la Sainte Famille est unique et sa lumière représente la grandeur de la résurrection de Notre Seigneur.

Dans les vitraux, les formes abstraites prédominent, combinant un entrecroisement de lignes droites et de lignes courbes pour marquer la composition et lui donner du dynamisme. Face à cette abstraction formelle, il est sélectionné habilement la palette de couleurs et de tonalités pour chaque vitrail, en évitant les mélanges de tons froids et chauds qui caractérise les vitraux médiévaux, générant ainsi une atmosphère presque surnaturelle grâce à la qualité de la lumière et au reflet des dessins sur les murs du temple.


II. SAGRADA FAMILIA : "L'EXTÉRIEUR DU PLUS BEAU BÂTIMENT DU MONDE"
La Sagrada Familia est une "cartographie du sacré, une grande carte ouverte où le monde peut lire les grandes questions de la vie, de l'origine et de la fin, du ciel et de la terre" (cardinal Luís Martínez Sistach). "Parce qu'elle ouvre les cœurs, même les plus fermés, en créant une fissure où l'Esprit peut entrer. (...) Car lorsqu'on entre, on reste bouche bée, admiratif, c'est un chef-d'œuvre de la via pulchritudinis, la voie de la beauté, qui ouvre à la foi" (le recteur Josep Maria Turull).

La façade de la Nativité, dite « du Levant », est la seule à avoir été construite du vivant de Gaudí. Les travaux du temple ont continué à partir de cette porte, puisque, comme Gaudí le dit : « […] si au lieu de faire cette façade décorée, ornée, ampoulée, j'avais commencé par celle de la Passion, dure, aride, comme faite d'os, les gens se seraient plaints. » Gaudí voyait dans la Nativité le symbole de la vie et de la création, inspirant du coup l'ornementation exubérante et chargée. Des animaux et des outils se mélangent aux symboles.

Le porche

De droite à gauche, le portail de la Foi, de la Charité, de l'Espoir
Gaudí a conçu pour ce porche une iconographie impressionnante. Outre les figures religieuses, d'énormes quantités d'éléments végétaux servent de trait d'union entre les différents motifs religieux dans une imaginative explosion de vie. Le porche est composé de trois portails: de la Foi (à droite), de l'Espoir (à gauche) et de la Charité (au centre). Ses motifs sculpturaux montrent une représentation vaste et fantaisiste de la vie Jésus. L'archivolte de chaque vestibule continue vers le haut en formant une lanterne qui se termine en un pinacle.

À coté de Jésus, le boeuf et l'âne
C'est le portail central, il est divisé en deux entrées différentes par une colonne qui soutient des statues de Jésus, Marie, Joseph et des anges, complétées sur ses deux côtés par des groupes sculpturaux qui représentent l'adoration des rois et les bergers.

Plus haut, nous trouvons des figures d'anges musiciens, entourés par un monde végétal avec des fleurs de plusieurs espèces, des animaux et des oiseaux. L'ensemble couvrant toute la surface du porche et lui donnant une impressionnante unité d'aspect malgré une surface immense.

Dans la partie supérieure de cet ensemble, on trouve une représentation des signes du Zodiaque dans leur position cosmogonique la nuit de la naissance du Christ. Le recours aux signes zodiacaux nous renvoie directement au déterminisme médiéval voulu par Gaudi lors de la conception initiale de la cathédrale. Plus haut, dans une grotte entourée d'oiseaux, nous trouvons les images du couronnement de la Vierge Marie.

En plein centre, sur la porte principale et entre les quatre tours, se trouve un cyprès symbolisant l'arbre de la vie. Il est surmonté d'une croix en forme de T : tau. C'est le symbole de Dieu le Père. Deux diagonales le recouvrent en forme de X, chi, symbole du Christ. Enfin, une colonne avec deux ailes ouvertes est une allusion à l'Esprit saint.


"Au Temple de la Sagrada Familia, les pauvres sont attachés aux murs comme des moules sur des rochers", a fait remarquer le peintre Joaquin Mir à Gaudí. Ce dernier, impressionné par la description graphique, a répondu « et où pourraient-ils recevoir une meilleure protection sinon dans l'ombre de cette église, fruit de la charité chrétienne? » D'où le surnom approprié de "Cathédrale des pauvres".


Deux tortues sont sculptées à la base, l'une de mer, côté littoral, et une de terre, côté montagne. Au Moyen Âge, il était habituel de représenter la ville de Jérusalem par une tour posée sur une tortue, symbolisant également le trait d'union entre ciel et terre.

La partie supérieure des colonnes porte des feuilles de palmiers représentant l'arbre généalogique de Jésus. Chaque feuille porte le nom d'un de ses ancêtres. Face à la baie vitrée du tympan composé des deux ogives et rosaces, nous voyons l'étoile de Bethléem et, sur des piédestaux, l'image de l'Archange Gabriel dans l'Annonciation faite à la Vierge.
2/ La façade de la Passion

La façade de la Passion contraste fortement avec la façade de la Nativité. Conçue pour représenter la douleur et le sacrifice du Christ, cette façade est dépouillée, avec des sculptures anguleuses et sombres crées par Josep Maria Subirachs, suite à la mort d'Antonio Gaudi en 1926. Elle raconte les derniers jours de Jésus, de la dernière Cène à la crucifixion, avec un symbolisme fort et une architecture minimaliste, pour ne pas dire austère.

Dessin original de la façade, réalisé par Gaudi en 1911
En 1911, Antoni Gaudi contracta la fièvre de Malte et déménagea dans la localité pyrénéenne de Puigcerda pour se soigner dans un environnement plus sain que la Barcelone industrielle de l'époque. C'est durant sa retraite forcée que Gaudi vit la mort de près - il rédigea même son testament - ce qui lui apporta l'inspiration nécessaire pour imprégner son projet de cet esprit de douleur, à tel point qu'il reconnut plus tard son intention de communiquer la peur à travers cette façade.
De cette étape, il laissa des ébauches qui servirent de source d'inspiration pour la reprise des travaux en 1954, mais s'en tint uniquement à la partie décorative, laissant aux générations futures l'interprétation du programme sculptural. Une fois la structure du portail et les quatre clochers achevés, c'est le sculpteur Josep Maria Subirachs qui à partir de 1954 se chargea de mettre en scène toute la souffrance et la tristesse que Gaudi avait imaginé pour cette façade orientée symboliquement vers le coucher du soleil.




1. La Cène 2. L'arrestation de Jésus 3. La trahison de Judas 4. La flagellation 5. Le reniement de Pierre 6. L'Ecce Homo ("voici l'homme") 7. Le jugement de Pilate 8. Jésus tombe devant les trois Marie 9. Jésus console les femmes de Jérusalem 10. Longinus sur un cheval 11. Des soldats lancent des dés pour gagner la tunique de Jésus 12. La crucifixion 13. Descente de Croix et mise au tombeau 14. Carrière et jardin 15. Tombeau vide 16. Le vitrail de la Résurrection 17. Croix et anges 18. Saint-esprit 19. L'ascension de Jésus
Pour aller plus loin : l'excellent Sagrada Familia chez DosDeArte > édition visuelle

III. PARTICULARITÉS ET SECRETS DE LA SAGRADA FAMILIA
Pourquoi fut-elle construite? Un libraire...
Une partie de la société espagnole changea radicalement ses habitudes avec la révolution industrielle : elle passa de coutumes éminemment rurales à une nouvelle vie urbaine. Ce processus enclencha une crise spirituelle, que le clergé espagnol combattit avec l'œuvre missionnaire de nombreux ecclésiastiques décidés à faire renaître la foi de millions de citoyens. En 1866, la fondation de l'Association des dévots de saint Joseph s'engagea aux côtés de l'Église pour tenter de préserver le catholicisme conservateur.

En 1878, l'association comptait déjà un demi-million de membres ce qui encouragea son créateur, le libraire et philanthrope Josep Maria Bocabella, à se lancer dans la construction d'un temple expiatoire dédié à la sainte Famille, financé uniquement par les dons des fidèles. Il passa plus de dix ans à chercher un terrain idéal pour concrétiser son rêve, et la première pierre de la Sagrada Familia fut posée en mars 1882.

La Sagrada Familia sera l'église la plus haute du monde
Une fois achevée, la construction de ce temple moderniste fera de lui l'église la plus haute du monde. Cela grâce à la tour dite Tour de Jésus, la plus imposante de l'ensemble, qui atteindra une hauteur de 172,5 mètres. Le projet de Gaudí dépassera ainsi de 11 mètres l'église d'ULM, en Allemagne, qui détient jusqu'à présent ce record avec 161 mètres. Les 18 tours représentent les 12 apôtres, la Mère de Dieu, les 4 évangélistes et Jésus-Christ. Ces tours sont alignées de telle sorte qu'elles sont orientées vers des points significatifs dans le ciel. Ainsi, la tour de Jésus-Christ est la plus haute de toutes, mais pensée pour être plus basse que la montagne de Montjuïc. Pourquoi? Parce que Gaudí croyait que l'œuvre de l'homme ne pouvait jamais surpasser celle de Dieu.

La construction dure depuis plus de 150 ans
La construction de la Sagrada Família a commencé en 1882. Lorsque Gaudí décédait en 1926, seul un quart de la basilique était achevé. Bien que Gaudí ait consacré ses dernières années à ce projet, il était déjà clair qu'il ne serait pas en mesure d'achever la construction de son vivant. La construction devrait maintenant rentrer dans sa phase finale et on estime que la Sagrada Família sera probablement achevée en 2030.
La construction de bâtiments uniques prend beaucoup de temps
Dans le cas de la Sagrada Família, cela représente environ 150 ans, ce qui est certainement long pour un seul bâtiment. Une fois l'église achevée, la durée de construction sera plus longue que celle des pyramides d'Égypte, mais environ 50 ans plus courte que celle de la Grande Muraille de Chine. Evidemment, lorsque la construction a commencé en 1882, Gaudí et son équipe ne disposaient ni d'ordinateurs ni d'animations numériques. Aujourd'hui, la technologie assistée par ordinateur est en train de le construire.

Gaudi et la maquette inversée
L'une de des méthodes de travail la plus originale est la modélisation du bâtiment à l'aide de chaînettes et de ficelles. De petits sacs de sable accrochés à ces chaînes représentent les forces exercées. Retournée, la structure devient la maquette du bâtiment. Gaudí écrit : "J'ai cette qualité de sentir, de voir l'espace du fait que je suis fils de chaudronnier. Le chaudronnier est un homme qui d'une surface fait un volume ; il a vu l'espace avant de commencer son travail."
La façade témoigne du passage du temps
L'une des choses les plus intéressantes lors de la visite de la Sagrada Familia est de se promener autour du bâtiment en contemplant ses différentes façades. Il n'est pas nécessaire d'être un grand expert en architecture pour constater qu'il existe différentes « nuances » sur chacune d'elles. Cela s'inscrit dans le dessein de Gaudí : que la basilique soit un témoignage du passage du temps. L'architecte insistait sur l'importance de traiter chaque façade de manière indépendante pour qu'elle réponde aux goûts architecturaux de chaque époque.

Gaudí avait tout planifié… mais cela n'a pas été conservé
Conscient que la fin de sa vie interviendrait bien avant la fin des travaux, Gaudí travailla intensément pour laisser le projet achevé. À sa mort, l'architecte disposait de nombreux croquis, plans et instructions pour les différentes phases de la construction. Les architectes qui lui succédèrent ont utilisé ses plans pour chaque aspect structurel et décoratif de l'église. Malheureusement, une grande partie de ces informations a été perdue pendant la Guerre civile, si bien que l'image actuelle de l'église ne pourra jamais correspondre à 100%.

La construction d'une école
Au début de la construction de la Sagrada Família, Gaudí fit construire une école pour les enfants des ouvriers qui travaillèrent jour et nuit à la construction de l'un des bâtiments les plus magiques au monde. Cette école de la Sagrada Família a été fondée en 1909 et abrite aujourd'hui l'exposition de la Sagrada Família.

Pas une seule ligne droite : la contemplation de la nature
L'un des principes constructifs les plus intéressants suivis par Gaudí est que l'intérieur du temple ne présente pas une seule ligne droite. Comme on peut le voir dans d'autres projets de l'architecte, Gaudí créait à partir de la contemplation de la nature. Il en va de même à la Sagrada Familia, où toutes les colonnes et parois présentent une structure ondulée et sinueuse. Comme l'expliquait l'artiste, « la ligne droite est de l'homme, la courbe est de Dieu ».

La basilique compte des pierres provenant de nombreux pays
Chaque pierre est transportée depuis les carrières jusqu'au site, où elle est examinée et soumise à des tests pour évaluer sa dureté et sa résistance au temps. Ces exigences élevées ont conduit, au fil du temps, à l'exploitation de très nombreuses carrières. Des carrières de Montjuïc jusqu'à d'autres situées en Cantabrie, Angleterre, Écosse ou Galice. À Barcelone, elles sont ensuite travaillées par des spécialistes de la taille de pierre, qui veillent à chaque détail pour faire en sorte qu'aucune d'elles ne soit semblable à une autre placée dans le temple.

Un cloître à l'épreuve du bruit
Gaudí révolutionne le concept de cloître pour y ajouter de nouvelles utilités : amortir le bruit provenant de la rue et permettre la célébration de processions tout le long de ses galeries portiquées. L'architecte Antoni Gaudí conçut le cloître de la Sagrada Familia comme une galerie portiquée rectangulaire où les quatre côtés correspondent aux quatre façades. Bien qu'il s'agisse d'un espace fermé, et malgré l'absence de jardin, l'éclairage naturel de la galerie portiquée conçue par Gaudí est assuré par les grandes fenêtres et rosaces de chaque module qui donnent sur l'extérieur.

Comment arrive-t-on à un tel réalisme des sculptures ?
Afin que les sculptures acquièrent le plus de réalisme possible, Gaudí utilisait comme modèle des personnes, des bonhommes voire des squelettes qu'il photographiait pour que les sculpteurs s'en inspirent. Llorenç Matamala fut le responsable des sculpteurs du temple et l'auteur de nombreux groupes sculpturaux de la façade comme les Anges à la trompette, le Massacre des Innocents, la Fuite en Égypte, la barque de saint Joseph, Jésus charpentier ou l'Immaculée Conception.

Certaines sculptures ont été réalisées par Gaudi
Gaudí réserva le sommet de la porte à l'arbre de vie. L'architecte fit couronner la sculpture de l'arbre (un cyprès) de 21 colombes blanche en albâtre et d'un pélican qui alimente ses petits, tout un symbole eucharistique. Au pied de cet arbre de vie se trouvent les sculptures des anges porteurs du pain et du vin. C'est l'un des rares ensembles sculpturaux élaborés par Gaudí en personne.

Gaudi dévôt à la Vierge Marie
La foi chrétienne du catholique Antoni Gaudí se consolida de façon exponentielle tout au long des 43 ans qu'il consacra à la direction des travaux de la Sagrada Familia. Or, tout jeune déjà, Gaudí vouait un culte particulièrement profond à la Vierge Marie. Inculqué par cette ferveur à la Vierge existante en Europe et par ses propres convictions mariales, Gaudí décida de consacrer tout l'ensemble des constructions de la façade de l'abside à la mère de Jésus. Par opposition, il consacra les sept chapelles internes de la tête du temple aux Douleurs et Allégresses de saint Joseph.

L'âge du Christ et les chiffres omniprésents
Si vous visitez l'église plusieurs fois, vous vous apercevrez qu'à chaque visite, vous découvrez des faits nouveaux. Sur la façade de la Passion, il en est une qui vous surprendra énormément. Il s'agit d'un petit encadré de chiffres quasi invisible, connu sous le nom de carré magique de la Sagrada Familia. Lorsque le visiteur pose son regard dessus, il constate qu'il est divisé en une grille comportant des nombres différents. Si l'on additionne ces chiffres, verticalement, horizontalement ou en diagonal, le total est de 33. Ce nombre correspond à l'âge auquel le Christ est mort. De manière générale, les nombres jouent un rôle important dans la Sagrada Familia et, en particulier, les nombre "5" et "3". Le 5 fait référence aux cinq sens humains et est un symbole de la perfection, tandis que le 3 symbolise la Trinité (Père, Fils et Saint-Esprit).

De nombreux orgues, mais un seul organiste
Bien qu'il ne s'agisse pas nécessairement d'un lieu de concert typique, une représentation à la Sagrada Familia est un spectacle inoubliable. Avec ses 1492 tuyaux, son orgue peut produire un son phénoménal. Cependant, en raison des défis acoustiques posés par son architecture, un seul n'est pas suffisant ! Ainsi, plusieurs autres orgues - totalisant 8000 tuyaux - seront installés autour de l'église. Et le meilleur ? Un organiste pourra les contrôler simultanément.

Le premier et le dernier architecte de la Sagrada Familia
Gaudí et la Sagrada Familia sont deux réalités indissociables depuis des décennies. Pourtant, tout le monde ne sait pas que cette basilique n'a pas été, au départ, confiée au génie de Reus. Le premier responsable fut un architecte nommé Francisco de Villar et, bien qu'incroyable, la Sagrada Familia devait initialement être une modeste église conforme aux goûts esthétiques de l'époque, avec une prédominance du style néogothique. Après sa démission, un quasi inconnu Antoni Gaudí, âgé de 31 ans, reprit le projet pendant 43 ans et le transforma en la merveille qu'il est aujourd'hui. Actuellement âgé de 62 ans, Jordi Fauli est le 7ème architecte en chef de la Sagrada Família depuis 2012 et avait 31 ans lorsqu'il a rejoint le projet (le même âge que Gaudí dans les dites fonctions).

Gaudí est mort en 1926 à l'âge de 73 ans suite à un tragique accident de tramway. Dans un quiproquo cruel, il n'a pas été reconnu immédiatement et fut pris pour un vagabond car il était habillé simplement ce jour-là et n'avait aucun papier d'identité sur lui. Il a finalement été transporté à l'hôpital où l'aumônier de la Sagrada Familia l'a reconnu le lendemain, mais son état s'était alors tellement détérioré qu'il est décédé. Son empreinte indélébile sur Barcelone demeure, et il repose aujourd'hui dans la crypte de sa propre basilique, en lui dédiant un lieu d'inhumation dans la chapelle de la Vierge du Carmen, au sein même de la Sagrada Familia. Là reposent ses restes depuis.

2026 : une date d'achèvement symbolique
La guerre civile espagnole a interrompu la construction de la Sagrada Família, lorsqu'une partie des plans originaux conçus par Gaudí a été détruite dans un incendie par les révolutionnaires en juillet 1936. L'église est aujourd'hui la plus grande église catholique romaine inachevée au monde. Mais les travaux de construction de la Sagrada Familia ont été menés à un rythme soutenu ces dernières années. L'objectif initial est d'achever la construction de la basilique en 2026, ce qui correspondrait au centenaire de la mort d'Antoni Gaudí. Malheureusement, la COVID-19 et les problèmes de financement ne permettront pas la réalisation complète de ce rêve. Aujourd'hui la Fondation de la Construction vise 2034 pour «achever la partie constructive, la verticalité». Ce qui sera inauguré en 2026, si tout se passe bien, c'est la Tour de Jésus, la tour centrale du temple.

Patrimoine mondial de l'UNESCO
Bien que le bâtiment soit loin d'être terminé, il a été inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO en 1984. La Sagrada Família doit ce titre principalement à l'architecture unique, innovante et artistique de son créateur. Antoni Gaudí était bien plus qu'un architecte. Sa vision de la nature comme source d'inspiration l'a conduit à créer une structure qui ne repose pas uniquement sur des lignes droites. Ses courbes, formes organiques et designs innovants imitent des formes naturelles et organiques comme le tronc d'un arbre ou le mouvement d'une vague. Les arbres ? Ce sont les tours. Les racines ? Les colonnes inclinées. Un hommage à la nature à couper le souffle. La Sagrada Família est l'un des sept bâtiments de Gaudí inscrits sur la liste de l'UNESCO.

La Sagrada Família n'a pas été conçue comme une cathédrale
Au début de la construction, elle était destinée à être une église catholique relativement simple. Plus tard, La Sagrada Família fut appelée cathédrale, mais elle ne peut plus être une cathédrale : il existe déjà une cathédrale dans la partie gothique de Barcelone et il n'y en a toujours qu'une par diocèse (siège de l'évêque). «Basilique» est un titre honorifique accordé par l'Église catholique et attribué uniquement aux églises particulièrement respectées et impressionnantes.

Tentative de profanation de la tombe pendant la guerre civile espagnole
En 1936, au milieu de la guerre civile espagnole, un groupe d'anarchistes a envahi la Sagrada Família et a mis le feu à la crypte, mais aussi à l'atelier de Gaudi. Bien que certaines matériaux de construction importants aient été perdus, une partie a pu être sauvée. Pendant cette période de l'histoire, la construction a avancé pour des raisons évidentes.

Discussion autour des façades et de son achèvement
La façade de la Nativité, achevée du vivant de Gaudí, est authentiquement son oeuvre. Mais les façades de la Passion et de la Gloire ont été construites plus tard et ne sont pas encore terminée. Le concept de la Façade de la Passion a été inspiré par le peintre et sculpteur Josep Maria Subirachs, dont les oeuvres ont souvent été critiquées pour être trop abstraites et s'écarter du style comme de la vision de Gaudí. Au-delà, à la mort de Gaudí, en 1926, la structure était achevée à 15 ou 25 %. Depuis, sept architectes en chef se sont succédé. Les critiques ont déclaré que les techniques de construction actuelles, qui incluent la conception assistée par ordinateur, interfèrent avec la vision et les plans originaux de Gaudí et estiment que la construction devrait être interrompue. Le célèbre peintre Salvador Dali aurait déclaré : "Ce serait une trahison de penser à terminer la Sagrada Família... sans génie". Qu'il reste là, comme une énorme dent pourrie".

Des ascenseurs à disponibilité
La présence d'ascenseurs est déjà un fait remarquable pour un édifice religieux, mais si, en plus, on regarde ses tours étroites, on se demande probablement comment cela fonctionne. Bien qu'il ne s'agisse pas d'ascenseurs "magiques" en verre comme ceux de Willy Wonka, les visiteurs arrivent toutefois à visiter les parties les plus hautes et les plus basses du bâtiment. Certes, en sortant de l'ascenseur, il faut emprunter quelques couloirs et escaliers étroits pour accéder aux tours, mais ensuite, on peut admirer une vue exceptionnelle sur la ville.

Votre visite y contribue
Envisagez-vous de visiter et d'admirer la Basilique de vos propres yeux? Faites-le, sans hésitation! Chacun des 20 millions de visiteurs chaque année contribue au financement de sa construction, ce qui revient environ à 110 millions d'euros par an. Grâce aux frais que vous payez pour votre visite (et à la contribution des donateurs), vous aussi participez à la construction de ce chef-d'œuvre!

III. ANTONI GAUDI FAISEUR DE MIRACLES
D'après Vatican Insider, Antoni Gaudi pourrait être bientôt béatifié. L'association qui prône la béatification de Gaudí a commencé à répertorier des cas de miracles présumés qui pourraient lui ouvrir les portes de la sanctification. Le dossier sera transmis au Vatican, devra être validé par deux commissions, l'une scientifique, l'autre théologique.

Le cas le plus récent concerne Ramón Amargant, un catholique pratiquant de 62 ans. Cet habitant de Canet de Mar, en Catalogne, a subi trois interventions successives pour qu'on lui implante une prothèse de titane. Ces opérations s'étaient soldées par une plaie ouverte qui suppurait en permanence. Or son état s'est amélioré de façon spectaculaire en quarante-huit heures. "La plaie a cicatrisé et je n'éprouve aucune gêne. Les médecins ne s'expliquent pas le phénomène." Ce n'est pas la première fois que M. Amargant demandait de l'aide à Gaudí. Ses prières sur la tombe de l'architecte, dans la crypte du temple, pour la guérison d'un ami atteint de cancer, ont apparemment été exaucées. "Je ne crois pas qu'un être humain puisse avoir commencé la Sagrada Familia sans intercession divine", confie-t-il.

Le vice-postulateur de la cause de la béatification et recteur de la Sagrada Familia, le prêtre Lluís Bonnet, a raconté un autre épisode "surnaturel" relaté par son propre protagoniste, le photographe Andreu Català. Le 6 février 2002, rapporte ce dernier, il faisait des photos du haut de la grue qui se dresse dans la nef centrale de la Sagrada Familia. Un brusque coup de vent lui fit soudain perdre l'équilibre, et l'un de ses objectifs tomba de 90 mètres de haut. Craignant d'avoir blessé quelqu'un, il invoqua aussitôt Gaudí. Il chercha en vain l'objectif : impossible de mettre la main dessus. Un mois et demi plus tard, il retrouva l'objet au pied de la grue. L'objectif, bien que rempli d'eau, était intact. Il portait deux marques attestant de sa chute.

Un livre récemment publié par l'Association pour la béatification d'Antoni Gaudí, présidée par l'architecte José Manuel Almuzara, fait état de nombreuses faveurs apparemment obtenues grâce à l'intercession du créateur de la Sagrada Familia : retrouvailles familiales, emploi, aides pour obtenir un logement. Beaucoup de ces témoignages proviennent d'Amérique latine.

L'ouvrage comprend une lettre du Polonais Stanislaw Dziwisz, jadis fidèle secrétaire de Jean-Paul II et actuel cardinal de Cracovie. Dans ce document daté de juin 2006, il se déclare un fervent admirateur de "l'architecte de Dieu". "J'avoue que la lecture de la biographie – en polonais ! – que vous m'avez offerte lors de mon séjour à Barcelone avec le pape m'a profondément ému, écrit-t-il. Je prie tout particulièrement pour cette béatification, que j'appelle de tous mes vœux." Et de conclure : "Pour ma part, je vous encourage à prier pour la prompte béatification de cet autre serviteur de Dieu, Jean-Paul II."
Ce n'est pas moi qui construis la Sagrada Familia, c'est elle qui me construit. (Antoni Gaudi)
Doté d'une intuition et d'une capacité créative hors du commun, Antonio Gaudí concevait ses immeubles de manière globale, depuis les questions structurales jusqu'aux aspects fonctionnels et décoratifs. Il étudiait ses créations dans les moindres détails, intégrant à l'architecture toute une série d'ouvrages artisanaux dont il maîtrisait les techniques à la perfection : la céramique, la verrerie, la ferronnerie, la charpente, etc. C'est ainsi qu'il introduisit de nouvelles techniques dans le traitement des matériaux, comme son trencadis, fait de pièces de céramiques cassées.

Son art a pour objet principal un christianisme proposé et perçu comme un mode de vie, la croissance de sa propre personne, celle de ses collaborateurs et de ses travailleurs, puis celle des visiteurs. Un art de vivre capable d'embrasser toutes les dimensions de la réalité dans une perspective chrétienne. L'architecte Antoni Gaudí, a consacré toute sa vie professionnelle à la construction de la Sagrada Familia.

Comme Benoît XVI l'a résumé dans l'homélie de la dédicace: « Et il a accompli ce qui est l'une des tâches les plus importantes aujourd'hui : surmonter la division entre la conscience humaine et la conscience chrétienne, entre l'existence dans ce monde temporel et l'ouverture à la vie éternelle, entre la beauté des choses et Dieu en tant que Beauté. Antoni Gaudí n'a pas réalisé tout cela avec des mots, mais avec des pierres, des lignes, des surfaces et des sommets. En réalité, la beauté est le grand besoin de l'homme ; elle est la racine à partir de laquelle se dressent le tronc de notre paix et les fruits de notre espérance. La Beauté est aussi révélatrice de Dieu car, comme lui, la belle œuvre est pure gratuité, invite à la liberté et arrache de l'égoïsme ».

Déjà en 1875, les dévots de Saint-Joseph publient dans leur magazine la première note qui parle du désir de construire une église. Celle-ci dit : « Quant aux moyens pour mener à bien une entreprise aussi ardue que la construction du Temple, il nous en faudra beaucoup, mais comme nous avons une confiance aveugle dans la protection de saint Joseph, nous n'avons pas peur qu'il puisse toucher le cœur des fidèles afin que chacun puisse y contribuer selon ses possibilités. L'aumône des pauvres et des veuves, ainsi que celle des millions de personnes, sera une expression de l'Évangile ». La transformation du cœur apparaît encore dans le document de la pose de la première pierre de la Sagrada Familia : « [Puisse cette construction] réveiller de leur tiédeur les cœurs endormis. Exalter la Foi, donner de la chaleur à la Charité. Puisse-t-elle contribuer à la miséricorde du Seigneur sur cette terre » (7 novembre 2010).

Un chantier de construction d'une église expiatoire a été lancé, qui a été radicalement modifié par rapport au projet initial, non pas en fonction de la situation sociopolitique, mais en correspondance avec le but qui l'avait inspiré. Cette inspiration initiale est modifiée jusqu'à celle que nous connaissons aujourd'hui, à partir de l'année 1837. Gaudí a succédé à un premier architecte, Francisco de Paula del Villar, qui avait déjà élaboré un projet. Les modifications substantielles apportées par Gaudí se révèlent dérivées de sa vigueur humaine et spirituelle. Gaudi lui-même, lorsqu'on l'a interrogé en tant qu'auteur du temple, a répété : «Ce n'est pas moi qui construis la Sagrada Familia, c'est la Sagrada Familia qui me construit», soulignant sa soumission à la mission. Dans un crescendo de la foi, Gaudí a fait siennes les vertus chrétiennes et en a fait l'inspiration et le critère pour déterminer les étapes de la construction, en interprétant les circonstances comme des invitations à des changements spirituels personnels, ce qui a aussi directement affecté le travail qu'il faisait.

Une église fruit exclusif de l'aumône
Voici comment Gaudi s'adressait à ses ouvriers : « À la Sagrada Familia, tout est providentiel, même mon entrée en tant qu'architecte, mais surtout l'importante donation que j'ai reçue au début des travaux et qui a permis de donner de l'importance au Temple et de construire la façade que nous sommes en train de terminer. S'il n'y avait pas de fonds, nous l'aurions conçue de manière plus modeste. Mais même la misère actuelle est providentielle. Parce que de cette façon, j'ai pu étudier toutes les parties moi-même, parce que s'il y avait trop d'argent, je passerais la journée à organiser le travail, en revanche, en allant petit à petit, on peut penser à des solutions pour chaque situation, sans tomber dans les répétitions industrielles ».
Et il poursuit : "On profite de la lenteur forcée que subissent les œuvres pour qu'elles gardent un rythme de perfection croissante. Même les cas qui auraient pu être répétés, maintenant, avec beaucoup de temps, nous pouvons les étudier à nouveau afin d'améliorer le résultat. Je reconnais également que les choses que je dis s'inscrivent dans une vision optimiste des faits, mais sans optimisme, des travaux importants ne peuvent être réalisés. (...) Toutes les choses méritent l'attention, elles sont toutes très complexes et, au fond, il y a toujours des raisons mystérieuses pour lesquelles notre limitation se perd. Passer à la légère sur les faits est une animosité (un confort de la bête). Pour pénétrer dans les choses, il faut les poursuivre patiemment ; la patience obtient tout, et la patience est la constance dans la peine inévitable ; il faut faire et refaire parce que la raison est une force interne et il faut l'appliquer en étant à l'intérieur des faits et non de l'extérieur."
Cette citation reflète bien l'âme qui a caractérisé Gaudí et imprégné son œuvre dans la Sagrada Familia. Un travail qui a besoin d'aumônes pour subvenir à ses besoins. Une fois la journée de travail terminée, s'il n'y avait pas assez d'argent pour payer les travailleurs, Gaudí allait personnellement de maison en maison dans les différents quartiers de la ville, reçu par des citoyens de tous horizons. Josep Maria Boccabella, qui accompagnait Gaudí, a déclaré : « Je ne demande pas pour moi, je demande pour la maison de Dieu, la maison de la Sagrada Familia. »
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