Enquête sur la vie après la mort

17/05/2025

C'est la plus vaste étude scientifique au monde jamais réalisée autour de la mort. Sous la direction du docteur Sam Parnia de l'université britannique de Southampton, 2 000 patients ont été interrogés au sortir d'un arrêt cardiaque. Or, près d'un sur deux (39 %) ont assuré avoir eu une "conscience étrange" de ce qui leur arrivait après l'arrêt du coeur, et ce, pendant trois minutes en moyenne. 46 % faisaient quant à eux état d'un "sentiment de peur", 9 % ont dit vivre une "expérience de mort imminente" et 2 % ont carrément affirmé être "pleinement conscients"...

Arrêt cardiaque : une étude objective les expériences de mort imminente

Il est classique de penser que l'arrêt de la fonction cardiaque, puis cérébrale dans les 30 secondes qui suivent, signent la mort d'un individu. Pourtant, les récits rapportant des expériences de mort imminente (ou near death experience, NDE) viennent contredire les données de la science et de la médecine sur ce que l'on pense être la mort, et la perte définitive de conscience qui l'accompagne. Dans une grande étude scientifique consacrée à l'examen approfondi des expériences de mort imminente, le Dr Sam Parnia (professeur assistant en soins intensifs et chercheur en réanimation, New York) et son équipe viennent de montrer que, primo, 39% des patients faisaient état d'une certaine sorte d'«éveil » pendant leur arrêt cardiaque, secundo, les sensations visuelles et auditives décrites ne relevaient pas forcément d'un phénomène hallucinatoire et, tertio, le délai de « conscience » pouvait s'étendre jusqu'à 3 minutes après l'arrêt cardiaque. De quoi repenser nos définitions de la «mort».

39 % des ressuscités disent avoir « ressenti » quelque chose pendant l'arrêt cardiaque

Dans notre monde cartésien, les frontières de la mort restent floues. En témoignent les récits d'expériences de mort imminente (ou near death experience, NDE) auxquels le monde médical et scientifique accorde, dans sa grande majorité, peu de crédit. Ce n'est assurément pas le cas du Dr Sam Parnia qui, depuis plus d'une dizaine d'années, s'intéresse de près à ce qui ce passe en péri-arrêt cardiaque, au point d'avoir mis en place l'étude multicentrique et transdisciplinaire AWARE (AWAreness during REsuscitation) afin d'approcher scientifiquement les états de conscience et les expériences de mort imminente (NDE) – rapportées par 10% des ressuscités - au moment de l'arrêt cardiaque

L'étude AWARE se déroule dans 5 hôpitaux au Royaume-Uni, aux Etats-Unis et en Autriche. Elle a inclus 330 arrêts cardiaques ressuscités dont 140 étaient éligibles. Chacun des patients - des hommes à 67 %, d'âge moyen : 64 ± 13 ans (21 – 94) - a été interviewé sur ses souvenirs et son état de conscience au moment de l'arrêt cardiaque et de la réanimation. A l'issue d'un premier entretien, 61 % (85 des 140 patients) ont rapporté n'avoir aucun souvenir ni conscience de quoi que ce soit pendant l'épisode d'arrêt cardiaque. Et bien qu'aucun signe clinique d'un quelconque état de conscience n'ait été rapporté (pas de réponse moteur, ni verbale à la douleur, yeux clos et score de Glasgow de 3/15), 39 % (55/140) des participants à l'étude ont décrit à l'interview une sensation/souvenir de quelque chose, mais sans pouvoir forcément formuler ce dont il s'agissait.

« Cela suggère que davantage de personnes puisse avoir une activité mentale mais que leurs souvenirs leur échappent, soit en raison des lésions cérébrales consécutives à l'accident, soit en raison de l'effet délétère de la sédation sur la mémoire » commente le Dr Parnia dans un communiqué de l'Université de Southampton [2].

Des récits surprenants

Au cours d'une seconde étape, 101 personnes sur les 140 ont été réinterrogées quelques temps après (celles qui étaient en état de répondre à une interview). Les 85 personnes qui n'avaient gardé aucun souvenir/perception de l'arrêt cardiaque ont confirmé leurs dires, là encore pour celles qui étaient en état de le faire (soit 46 d'entre elles).

Parmi les autres participants à l'étude,

-9 des 101 (9%) ont rapporté des « sensations » compatibles avec ce qui est décrit lors des NDE (lumière, impression de bien-être, etc),

-46 (46%) ont évoqué des souvenirs précis mais sans rapport avec les descriptions classiques des NDE,

-2 (2%) des 101 personnes ré-interviewées ont été capables de décrire l'épisode de l'arrêt cardiaque et de la réanimation avec des détails visuels et auditifs précis.

Sur ces deux patients, l'un n'a pu continuer à être suivi car son état était trop sévère, l'autre, en revanche, fait un récit très étonnant de l'épisode hospitalier. Cet homme de 57 ans affirme être sorti de son corps et avoir observé la scène depuis un coin du plafond. Il a décrit de façon précise les faits et gestes de l'équipe médicale, de même que l'utilisation du défibrillateur automatisé externe (DAE), dont il dit avoir entendu 2 bips consécutifs. Fait étonnant : la description de la scène (y compris les paroles prononcées lors de la réanimation et la description physique de certains intervenants) rapporté par ce patient ont été corroborés par l'équipe médicale. Plus surprenant encore : les 2 bips du DAE « entendus » par ce patient ont permis d'évaluer la durée du phénomène de sortie de corps à 3 minutes !

Un état de « conscience » de 3 minutes

Pour le Dr Parnia, « ce témoignage est d'autant plus significatif que jusqu'à présent, les expériences en relation avec l'état de mort sont assimilées à des hallucinations qui surviendraient juste avant l'arrêt cardiaque ou lorsque le cœur repart à l'occasion d'une réanimation réussie. Dans ce cas, une conscience de ce qui s'est passé a été mise en évidence pendant une période de 3 minutes où le cœur était à l'arrêt. Ceci est d'autant plus paradoxal que le cerveau cesse de fonctionner dans les 20 à 30 secondes qui suivent l'arrêt du cœur et que son activité ne redémarre pas tant que le cœur n'est pas reparti. De plus, les souvenirs précis notamment visuellement de ce cas étaient totalement cohérents avec les évènements réels. »

Au final, si cette étude, la plus vaste à ce jour sur le sujet, « ne permet pas de conclure à la réalité ou à la signification des expériences d' « éveil » rapporté par certains patients, en raison de la trop faible incidence du phénomène de souvenirs visuels (2%), elle ne permet pas non plus de les désavouer et requiert de poursuivre les études dans ce domaine » indique Sam Parnia [2].

Tout en reconnaissant un certain nombre de limites, notamment le fait que les interviews aient eu des durées irrégulières compte-tenu de l'état de santé des personnes interrogées, les auteurs considèrent que cette étude apporte de nouvelles informations quant aux expériences mentales susceptibles de survenir au moment de la mort après un arrêt circulatoire. Ils suggèrent en revanche d'utiliser d'autres termes que celui de NDE pour d'écrire les expériences vécues en état de mort clinique, probablement trop restrictifs, au vu de la variété des situations décrites, et contribuant peut-être aux prises de position conflictuelles de la communauté scientifique sur la question.

« Contrairement à ce que nous pensons, la mort ne serait pas un instant donné, mais un processus potentiellement réversible » conclut Sam Parnia.

Qu'appelle-ton expériences de mort imminente (ou near death experience, NDE) ?

Cette expression désigne un ensemble de « visions » et de « sensations » consécutives à une mort clinique. Ces expériences correspondent à une caractérisation récurrente et spécifique contenant notamment : la « sortie du corps », le déroulement de sa propre existence à vitesse accélérée, la vision d'un tunnel, d'une lumière, le ressenti d'un sentiment d'amour infini, de paix et d'union. Cependant, rares sont les NDE qui associent tous ces éléments et on observe une certaine variation inter-individuelle.

REFERENCES :

  1. Parnia S, Spearpoint K, de Vos G et all. AWARE—AWAreness during REsuscitation—A prospective study. Resuscitation, Available online 7 October 2014. DOI: 10.1016/j.resuscitation.2014.09.004

  2. University of Southampton. Results of world's largest Near Death Experiences study published, 7 octobre 2014.

Comment la science révolutionne nos idées sur la vie et la mort

Non seulement les personnes peuvent survivre beaucoup plus longtemps après des blessures catastrophiques, mais il est désormais possible de réanimer des patients plusieurs heures après leur décès clinique.

Sam Parnia, médecin en soins intensifs à la faculté de médecine de l'université de New York, estime que nous sommes à l'aube d'avancées scientifiques majeures qui transformeront les soins médicaux de fin de vie. Il est l'un des plus grands experts mondiaux en réanimation et l'auteur de « Lucid Dying ».

Steve Paulson s'est récemment entretenu avec Parnia devant un public à la Morgan Library and Museum de New York au sujet de la nouvelle science de la réanimation.

Cet entretien a été édité pour des raisons de longueur et de clarté.

Steve Paulson : J'ai l'impression que la définition de la mort a beaucoup évolué ces dernières décennies. N'y a-t-il pas eu une époque où elle correspondait à l'arrêt cardiaque ? Puis à l'arrêt du fonctionnement cérébral. Quelle est la définition médicale actuelle de la mort ?

Sam Parnia : Rien n'a changé. Le problème est que le concept de séparation binaire entre la vie et la mort est incroyablement archaïque.

Comment définir la mort ? Tout état médical, accident ou maladie qui devient si grave qu'il provoque un arrêt cardiaque est considéré comme mortel. C'est pourquoi les termes « arrêt cardiaque » – que nous utilisons dans les hôpitaux – et « mort » sont synonymes. Il s'agit du même processus biologique.

Mais dans les années 1950 et 1960, des personnes qui auraient autrement subi des lésions cérébrales catastrophiques étaient maintenues en vie grâce à des appareils de réanimation. Les médecins ont alors commencé à découvrir que, sous respirateur, les lésions cérébrales peuvent devenir si graves que le cerveau meurt. Pourtant, comme elles sont toujours sous respirateur, elles semblent vivantes. C'est ainsi qu'est née la notion juridique selon laquelle une personne peut être déclarée morte si son cerveau est mort alors qu'elle est sous respirateur.

Paulson : Mais vous dites qu'il existe une zone grise lorsqu'on ne sait pas exactement si une personne est morte ou non. Est-il juste de dire que la mort est davantage un processus qu'un moment précis ?

Parnia : Oui, en quelque sorte. Le problème, c'est qu'une fois qu'on qualifie quelqu'un de mort, c'est censé être la fin, comme s'il n'y avait plus moyen d'avancer.

Vers la fin des années 1990 et le début des années 2000, une révolution a commencé dans ce domaine. Les scientifiques cherchaient de meilleures façons de cultiver des cellules cérébrales pour traiter des maladies comme la démence, la maladie de Parkinson et les accidents vasculaires cérébraux. Ils ont commencé à se rendre dans les morgues et à réaliser des biopsies de cerveaux de personnes décédées, et ils ont pu cultiver des cellules cérébrales dans des boîtes de Petri en laboratoire.

Au fil du temps, ce domaine a évolué vers ce que nous appelons aujourd'hui les organoïdes cérébraux. Ils cultivent des cerveaux en laboratoire à partir de cadavres de personnes décédées qui atteignent la taille d'un cerveau de fœtus. Et c'est parfaitement fonctionnel.

Ensuite, il y a eu un autre événement, dont je peux attendre que vous me posiez la question ou simplement en parler.

Paulson : On va parler des porcs maintenant ?

Parnia : On va parler de l'étude sur les porcs.

Paulson : Je vais vous présenter cette étude. Il y a quelques années, un groupe de scientifiques s'est rendu dans un abattoir pour trouver des porcs décapités, a prélevé les têtes et les a ramenées dans leur laboratoire.

Parnia : Dès le début des années 1980, il était devenu évident que les scientifiques pouvaient restaurer l'activité de chats morts et privés de circulation sanguine depuis plus d'une heure. Mais la plupart des gens ne s'en rendaient pas compte.

Avançons donc jusqu'en 2019, lorsqu'un groupe de scientifiques dirigé par le Dr Nenad Sestan de Yale a publié une étude dans Nature, l'une des revues scientifiques les plus prestigieuses. Ce qu'ils ont réussi à faire est absolument stupéfiant. Ils sont allés dans un abattoir, il ne s'agissait donc pas d'animaux de laboratoire. Il s'agissait d'animaux ordinaires transformés en chair à saucisse ; impossible d'être plus mort que décapité.

Ils ont emmené ces porcs dans leur propre laboratoire. Ils ont d'ailleurs appelé cela « un cerveau dans un seau ». Ils ont placé le cerveau dans un seau, y ont relié des tubes et ont injecté une solution spéciale dans les vaisseaux sanguins, puis ont attendu 6 à 10 heures.

Alors, que s'est-il passé ? Ces 32 cerveaux de porcs sont revenus à la vie. Ils ont retrouvé leur pleine activité. Il y avait une activité biologique et métabolique. Les vaisseaux sanguins répondaient correctement.

C'était tellement étonnant que lorsqu'ils ont montré ces cerveaux morts à d'autres scientifiques, ils ont cru voir des cerveaux sains. Ces scientifiques étaient tellement préoccupés par le fait de redonner vie à un cerveau de porc mort qu'ils ont décidé – grâce à un effort concerté des Instituts nationaux de la santé, des administrateurs de Yale, du Dr Sestan et de ses collègues – de minimiser considérablement leurs résultats.

Ils ont déclaré : « Eh bien, nous avons restauré l'activité métabolique, mais ce cerveau n'est pas vivant. » Mais cela n'a aucun sens. Un cerveau en activité biologique est vivant. Ils étaient tellement préoccupés par la possibilité de restaurer la conscience qu'ils ont administré des sédatifs pour bloquer tout signe de réveil émergeant dans les cerveaux. Et ils ont déclaré que les cerveaux n'étaient pas conscients.

Imaginez donc que vous soyez un cochon. Vous vous réveillez et découvrez votre cerveau dans un seau. Vous êtes conscient, mais vous ne pouvez pas crier, vous ne pouvez pas bouger, vous ne pouvez rien faire et vous êtes piégé.

Nous n'avons aucune idée de ce qui s'est passé, mais le fait est qu'ils l'ont fait.

Paulson : Et pour extrapoler à partir de cette étude, si on a pu faire cela avec un cerveau de cochon, on pourrait probablement le faire avec un cerveau humain.

Parnia : C'est tout à fait exact. La technologie existe maintenant pour faire cela avec le cerveau humain. Ils ont montré qu'après la mort – pendant des heures post-mortem – il est possible de restaurer l'activité cérébrale.

Bien sûr, le reste du corps fait également partie de l'équation. Cela signifie donc que nous pouvons réanimer des personnes décédées si nous parvenons à dépasser l'idée qu'une fois que nous vous qualifions de mort, c'est la fin et vous ne pouvez plus revenir. C'est une découverte majeure qui, je pense, mènera sans aucun doute à un prix Nobel.

Paulson : Que signifient ces récentes découvertes pour les personnes hospitalisées ou en service d'urgence ? Comment sauver une personne victime d'une crise cardiaque ? La première chose à faire est de refroidir le corps, n'est-ce pas ?

Parnia : On peut faire beaucoup. Malheureusement, les pratiques habituelles dans le monde sont archaïques. On fait encore ce qu'on faisait en 1960 : on fait des compressions thoraciques, on administre de l'oxygène, on peut administrer des chocs cardiaques, on peut administrer des médicaments très puissants, etc.

Mais pour moi, c'est du passé. C'est comme conduire une Ford T et être heureux de conduire. C'est ridicule, franchement. J'aimerais y parvenir en prenant des personnes décédées et en les connectant à des cathéters qui nous permettraient de leur administrer des nutriments oxygénés dans le sang, mais aussi un cocktail de médicaments, comme l'ont fait les scientifiques de Yale, pour préserver davantage le cerveau et les ramener à la vie, à condition que la maladie sous-jacente à l'origine de leur décès soit traitable.

Je ne peux pas faire cela avec une personne de 90 ans atteinte d'un cancer métastatique et dont le corps est complètement dévasté. Mais si je faisais moi-même une crise cardiaque, ce que je risque de faire étant donné mon âge, je ne devrais pas mourir.

La société considère la mort comme une dégradation rapide. On enseigne aux médecins que lorsqu'on meurt, on se dégrade rapidement en cinq minutes, puis on disparaît. Mais en réalité, ce n'est pas le cas.

On a cette longue zone grise où l'on est vraiment mort, mais où les cellules entrent en quelque sorte en état d'hibernation si l'on sait comment réagir. Il y a un moment où les dommages mènent à la dégradation. Mais il ne s'agit pas d'heures, ni même de jours.

Nous faisons des découvertes incroyables qui nous aideront non seulement à trouver comment sauver des vies, mais aussi à explorer ces questions profondes sur ce qui nous arrive à tous lorsque nous traversons l'épreuve de la mort. Il ne faut donc plus considérer cela comme une question religieuse ou philosophique. La science est là.

Conscience pendant la réanimation — Une étude prospective

1. Introduction

L'observation selon laquelle la réanimation réussie après un arrêt cardiaque (AC) est associée à un certain nombre de conséquences psychologiques et cognitives, notamment le syndrome de stress post-traumatique, la dépression et la perte de mémoire, ainsi qu'à des processus mentaux spécifiques pouvant présenter des similitudes avec la conscience pendant l'anesthésie. Ce qui a soulevé la possibilité que la conscience puisse également survenir pendant la réanimation après un AC. Outre les perceptions auditives, caractéristiques de la conscience pendant l'anesthésie, les survivants d'un AC ont également rapporté des perceptions visuelles vives, caractérisées par la capacité perçue d'observer et de se souvenir d'événements réels se produisant autour d'eux. Bien que la conscience pendant l'anesthésie soit associée à des états de rêve, l'expérience mentale spécifique décrite en association avec l'AC est inconnue. Les patients atteints d'AC ont rapporté des perceptions visuelles ainsi qu'une activité cognitive et mentale, incluant des processus de pensée, un raisonnement et la formation de la mémoire. Il a également été rapporté que les patients se souvenaient de détails précis relatifs à des événements survenus pendant la réanimation.

Bien que de nombreux témoignages anecdotiques aient fait état de ce phénomène, seules quelques études ont utilisé une méthodologie de recherche rigoureuse pour examiner l'état mental associé à la réanimation après AC. Ces études ont examiné le terme scientifiquement imprécis mais couramment utilisé d'« expériences de mort imminente » (EMI). Bien que des EMI aient été rapportées par 10 % des survivants d'AC. les expériences cognitives et mentales globales associées à l'AC, ainsi que la conscience, et l'association entre les événements d'AC réels et le souvenir auditif/visuel des événements, n'ont pas été étudiées. L'objectif principal de cette étude était d'examiner l'incidence de la conscience et le large éventail d'expériences mentales pendant la réanimation. L'objectif secondaire était d'étudier la faisabilité d'une nouvelle méthodologie pour tester l'exactitude des rapports de perception et de conscience visuelles et auditives pendant l'AC. 

2. Méthodes

Dans cette étude observationnelle multicentrique, les méthodes ont été initialement testées dans cinq hôpitaux avant le début de l'étude (01/2007–06/2008). L'équipe a ensuite recruté 15 hôpitaux américains, britanniques et autrichiens (sur un groupe initial de 25) pour participer à la collecte de données. Entre 07/2008 et 12/2012, le premier groupe de patients atteints d'AC a été inclus dans l'étude AWARE. Ces patients ont été identifiés grâce à un système de radiomessagerie local qui alertait le personnel des événements d'AC. Les patients atteints d'AC étaient éligibles à l'étude s'ils répondaient aux critères d'inclusion suivants :

• AC définie par l'arrêt du rythme cardiaque et de la respiration (hospitalier ou extrahospitalier avec réanimation cardio-pulmonaire (RCP) en cours à l'arrivée aux urgences).

• Âge > 18 ans.

• Patients survivants jugés aptes à être interrogés par leurs médecins et leurs soignants. • Patients survivants ayant donné leur consentement éclairé à la participation.

Dans la mesure du possible, les entretiens ont été menés par une infirmière de recherche ou un médecin alors que le survivant d'un AC était encore hospitalisé.

Les enquêteurs ont tous suivi une formation spécifique à la méthodologie d'entretien dispensée par le responsable de l'étude/investigateur principal. Le consentement éclairé a été obtenu lorsque les patients ont été jugés médicalement aptes à participer à un entretien en personne avant leur sortie. Pour les patients n'ayant pas pu être interrogés pendant leur séjour à l'hôpital, un protocole d'entretien téléphonique a été établi afin de permettre leur consentement et de les interroger par téléphone pour minimiser les pertes de suivi. Compte tenu de la gravité de l'état de santé, l'étude a pris en compte une proportion importante de patients ne pouvant participer pour des raisons de santé dans le calcul de la taille de l'échantillon.

L'étude a reçu l'approbation éthique de chaque site participant avant le début de la collecte des données. Sur avis du comité d'éthique, un protocole a été mis en place pour éviter de contacter les personnes non interrogées pendant leur séjour à l'hôpital et décédées après leur sortie. Des registres de décès et des lettres aux médecins des patients demandant l'autorisation de contacter leurs patients ont été mis en place afin d'identifier les patients décédés ou ceux qui ne devaient pas être contactés. Si aucune objection ou préoccupation n'était soulevée et que les patients étaient toujours en vie après leur sortie, un membre de l'équipe clinique initiale envoyait une lettre de présentation accompagnée d'une enveloppe timbrée et adressée demandant l'autorisation de contacter les patients de l'étude qui n'avaient pas été contactés pendant leur hospitalisation. Pour les patients qui acceptaient d'être contactés, un membre de l'équipe de recherche obtenait un consentement éclairé et effectuait la collecte de données par téléphone. Cependant, en raison de la gravité de l'état de santé (et en particulier des différents niveaux de déficience physique), combinée aux exigences établies par le comité d'éthique pour contacter les patients (décrites ci-dessus), le délai avant les entretiens téléphoniques après la sortie de l'hôpital était compris entre 3 mois et 1 an. Tous les entretiens à l'hôpital ont été réalisés avant la sortie de l'hôpital. Ces examens ont eu lieu entre 3 jours et 4 semaines après l'arrêt cardiaque, selon la gravité de l'état critique des patients.

Afin d'évaluer l'exactitude des déclarations de conscience visuelle (VA) pendant l'AC, chaque hôpital a installé entre 50 et 100 étagères dans les zones où une réanimation après AC était susceptible de se produire (par exemple, les urgences, les services de médecine aiguë). Chaque étagère contenait une image visible uniquement d'en haut (ces images étaient différentes et comprenaient une combinaison de symboles nationalistes et religieux, de personnes, d'animaux et de titres de journaux importants). Ces images ont été installées pour permettre l'évaluation des déclarations de VA décrites dans les comptes rendus précédents.4 Celles-ci incluent la perception de pouvoir observer sa propre réanimation après AC depuis un point de vue surélevé. Il a été postulé que si une grande proportion de patients décrivaient une AV associée à la perception de pouvoir observer les événements d'un point de vue supérieur, les étagères pourraient être utilisées pour potentiellement tester la validité de ces affirmations (les images n'étant visibles qu'en regardant vers le bas depuis le plafond).1 Étant donné que ces perceptions peuvent survenir après le retour des fonctions cérébrales suite à une réanimation, nous avons également installé une image différente (triangle) sous chaque étagère afin de tester la précision de l'AV, en se basant sur la possibilité que les patients aient regardé vers le haut après la récupération de l'AC ou aient eu les yeux ouverts pendant l'AC.

À l'aide d'un processus d'entretien en trois étapes, des questions générales et ciblées ont été posées aux patients sur leurs souvenirs pendant l'arrêt cardiaque. L'étape 1 des entretiens comprenait des questions démographiques ainsi que des questions générales sur la perception de la conscience et des souvenirs pendant l'AC. L'étape 2 des entretiens a approfondi la nature des expériences à l'aide de questions ouvertes pré-écrites et de l'échelle Greyson NDE en 16 items. Cette échelle NDE validée a été utilisée pour définir les NDE dans cette étude. Pour chacun des 16 items de l'échelle NDE, les réponses ont été notées 0 (absente), 1 (faiblement présente) ou 2 (fortement présente). Sur un score maximal possible de 32, une EMI était considérée comme présente avec un score ≥ 7, tandis que les expériences < 7 ne sont pas compatibles avec une EMI. Les patients présentant des souvenirs auditifs et visuels détaillés relatifs à leur arrêt cardiaque ont été sélectionnés pour un entretien approfondi (étape 3) afin d'obtenir des détails sur leur expérience. Cet entretien a été mené par le chercheur principal de l'étude.

À l'aide de données qualitatives et quantitatives, les souvenirs et les expériences des patients ont été initialement classés en deux grandes catégories :

(1) Absence de perception de conscience et/ou de souvenirs.

(2) Perception de conscience et/ou de souvenirs.

En fonction des réponses des patients à l'échelle des EMI, la deuxième catégorie a été subdivisée en trois autres catégories.

(3) Souvenirs détaillés non liés à une EMI sans rappel ni conscience des événements d'arrêt cardiaque.

(4) Souvenirs détaillés d'EMI sans rappel ni conscience des événements d'arrêt cardiaque.

(5) Souvenirs détaillés d'EMI avec enregistrements auditifs et/ou AV détaillés et rappel des événements d'arrêt cardiaque.

Afin d'évaluer les souvenirs auditifs, nous avons proposé un protocole d'introduction de « stimuli auditifs » pendant l'AC, similaire à ceux utilisés dans les études sur l'apprentissage implicite pendant l'anesthésie.9 Pendant la phase pilote, il a été demandé au personnel de mentionner le nom de trois villes ou couleurs spécifiques et d'évaluer la capacité des survivants à s'en souvenir par le biais d'un rappel de mémoire explicite ou implicite. Cependant, contrairement à l'environnement relativement contrôlé de l'anesthésie, le personnel a trouvé peu pratique d'administrer ces stimuli et cela n'a donc pas été reporté à l'étude principale. Les patients qui ont déclaré avoir eu une conscience visuelle et auditive (catégorie 5 ci-dessus), qu'ils aient été identifiés à l'hôpital ou lors de l'entretien téléphonique, ont été invités à participer à un entretien approfondi mené par le chercheur principal de l'étude afin d'obtenir plus de détails sur leurs expériences.

Les données quantitatives et qualitatives ont été analysées de manière descriptive. Les facteurs de confusion potentiels tels que l'âge, le sexe et le délai d'entretien ont été évalués. Les résumés des entretiens scénarisés ont été examinés et les réponses ont été regroupées en fonction des thèmes identifiés. Les différences potentielles de caractéristiques démographiques entre les groupes déclarants ont été évaluées. L'âge a été comparé à l'aide d'un test t à deux échantillons ou du test de la somme des rangs de Wilcoxon lorsque les tailles d'échantillon étaient petites. Le sexe a été comparé à l'aide du test du chi carré ou du test exact de Fisher lorsque les tailles d'échantillon étaient petites. L'analyse statistique a été réalisée à l'aide de StatXact-9 (Cytel Inc., Cambridge, MA) et SAS 9.3 (SAS Institute Inc., Cary, NC).

3. Résultats

Au total, 2060 événements d'AC ont été recensés, avec un taux moyen de survie globale de 16 % (n = 330) à la sortie de l'hôpital. Sur les 330 survivants, 140 patients ont été jugés éligibles, ont donné leur consentement éclairé et ont été interrogés. Cinquante-deux entretiens ont été réalisés à l'hôpital et 90 après la sortie. Deux patients ont refusé l'entretien et les 188 patients restants ne répondaient pas aux critères d'inclusion, sont décédés après leur sortie de l'hôpital, n'ont pas été jugés aptes à un suivi par leur médecin ou n'ont pas répondu aux lettres d'invitation pour un suivi téléphonique. Un résumé de la participation et des résultats de l'étude est présenté à la figure 1. Sur les 140 patients ayant terminé la première étape du processus d'entretien, 101 patients (72 %) ont poursuivi l'étape 2. Les 39 patients n'ayant pas pu terminer les deux étapes l'ont fait principalement en raison de la fatigue.

Parmi les personnes interrogées, 67 % (n = 95) étaient des hommes. L'âge moyen (± ET) était de 64 ± 13 ans (extrêmes 21-94). Après l'entretien de phase 1, 61 % (85/140) des patients n'ont signalé aucune perception de conscience ni de souvenirs (catégorie 1). Bien qu'aucun patient n'ait présenté de signes cliniques de conscience pendant la RCP, évalués par l'absence de réponse à l'ouverture des yeux, de réponse motrice, de réponse verbale, que ce soit spontanément ou en réponse à la douleur (compressions thoraciques) avec un score de 3/15 sur l'échelle de coma de Glasgow, 39 % (55/140) (catégorie 2) ont néanmoins répondu positivement à la question « Vous souvenez-vous de quelque chose de la période pendant laquelle vous avez perdu connaissance ? » Il n'y avait pas de différences significatives en termes d'âge ou de sexe entre ces deux groupes.

Parmi les 101 patients ayant complété les entretiens de phase 2, aucune différence n'existait selon l'âge ou le sexe. Les réponses à l'échelle des EMI sont résumées dans le tableau 1 et 46 (46 %) ont confirmé n'avoir eu aucun souvenir, conscience ou souvenirs. Les 55 patients restants sur 101 présentant une conscience perçue ou des souvenirs (catégorie 2) ont été subdivisés. Quarante-six ont décrit des souvenirs incompatibles avec une EMI et sans souvenir d'événements d'AC (score médian d'EMI = 2) (IQR = 3) (catégorie 3).

Tableau 1

Réponses à l'échelle des EMI de Greysona (nombre et pourcentage de réponses positives à chacune des 16 questions de l'échelle b).

Question

(1) Avez-vous eu l'impression que tout se passait plus vite ou plus lentement que d'habitude ?

(2) Vos pensées étaient-elles accélérées ?

(3) Des scènes de votre passé vous sont-elles revenues ?

(4) Avez-vous soudainement eu l'impression de tout comprendre ?

(5) Avez-vous ressenti un sentiment de paix ou de bien-être ?

(6) Avez-vous ressenti de la joie ?

(7) Avez-vous ressenti un sentiment d'harmonie ou d'unité avec l'univers ?

(8) Avez-vous vu ou vous êtes-vous senti entouré d'une lumière éclatante ?

(9) Vos sens étaient-ils plus éveillés que d'habitude ?

(10) Avez-vous eu l'impression d'être conscient de choses qui, normalement, auraient dû être hors de votre vue, comme par une perception extrasensorielle ?

(11) Des scènes du futur vous sont-elles apparues ?

(12) Vous êtes-vous senti séparé de votre corps ?

(13) Avez-vous eu l'impression d'entrer dans un autre monde, surnaturel ?

(14) Avez-vous eu l'impression de rencontrer un être ou une présence mystique, ou d'entendre une voix non identifiable ?

(15) Avez-vous vu des esprits décédés ou religieux ?

(16) Avez-vous atteint une frontière ou un point de non-retour ?

Les 9 patients restants sur 101 (9 %) ont eu des expériences compatibles avec des EMI. Sept (7 %) n'avaient aucun souvenir auditif ou visuel d'événements d'AC (score médian de l'échelle d'EMI = 10 (IQR = 4), score d'EMI le plus élevé 22) (catégorie 4). Le récit détaillé d'EMI d'un patient de ce groupe est résumé dans le tableau 2. Les deux autres patients (2 %) ont eu une conscience auditive/visuelle spécifique (catégorie 5). Les deux patients avaient souffert de fibrillation ventriculaire (FV) dans des zones non aiguës où les étagères n'avaient pas été placées. Leurs descriptions sont résumées dans le tableau 2. Tous deux ont été contactés pour des entretiens plus approfondis afin de vérifier leurs expériences par rapport aux événements d'AC documentés. L'un n'a pas pu assurer le suivi en raison de problèmes de santé. L'autre, un homme de 57 ans, a décrit la perception d'observer les événements depuis le coin supérieur de la pièce et a continué à ressentir une sensation de regarder d'en haut. Il a décrit avec précision les personnes, les sons et les activités lors de sa réanimation (le tableau 2 présente des citations de cet entretien). Son dossier médical corroborait ses récits et appuyait spécifiquement ses descriptions ainsi que l'utilisation d'un défibrillateur externe automatisé (DEA). D'après les algorithmes actuels des DEA, cela correspondait probablement à une conscience pouvant atteindre 3 minutes pendant l'AC et la RCP.2 Comme les deux AC s'étaient produits dans des zones non aiguës sans étagères, une analyse plus approfondie de la précision de l'AV basée sur la capacité à visualiser les images au-dessus ou en dessous de l'étagère n'a pas été possible. Malgré l'installation d'environ ?????

Après la reconnaissance d'un premier rythme choquable, les algorithmes intégrés du DEA exigent au moins 2 minutes de RCP avant qu'une nouvelle vérification du rythme soit suivie d'une deuxième tentative de défibrillation si cela est conseillé. En ajoutant le temps nécessaire à l'analyse du rythme et à la défibrillation, il est probable que la durée de l'EC ait été d'au moins 3 minutes.

Sur 1 000 étagères réparties dans les hôpitaux participants, seuls 22 % des EC ont effectivement eu lieu dans les services de soins intensifs et aigus où les étagères avaient été installées et, par conséquent, plus de 78 % des EC ont eu lieu dans des chambres sans étagère.

Bien que les EMI aient fourni une mesure quantifiable des souvenirs cognitifs des patients en lien avec l'EC, nous avons utilisé les transcriptions de nos entretiens avec des survivants d'EC dans le cadre des entretiens de phase 2 pour évaluer les récits des patients sans EMI (échelle d'EMI < 7). Bien que les études antérieures se soient largement concentrées sur la survenue d'EMI uniquement dans l'EC, notre observation de la présence d'autres thèmes cognitifs en dehors des EMI dans l'EC a conduit à une évaluation des récits pour d'autres thèmes spécifiques. Les récits ont été classés en sept thèmes : (1) la peur ; (2) les animaux et les plantes ; (3) une lumière vive ; (4) violence ou sentiment de persécution ; (5) expériences de déjà-vu ; (6) voir sa famille ; (7) se souvenir d'événements survenus probablement après la guérison de l'AC. Les récits sont présentés dans le tableau 3 par thème.

4. Discussion

Nos données suggèrent que les patients atteints d'une AC peuvent présenter divers processus cognitifs liés à la fois à l'AC et aux périodes post-réanimation. Bien que la proportion relativement élevée de patients percevant des souvenirs et une conscience soit inattendue et devrait être confirmée par de futures recherches, le fait que la fréquence observée des EMI (9 %) dans notre étude soit cohérente avec les rapports d'études antérieures (environ 10 %), pourrait apporter une certaine validité interne à cette observation. La constatation d'une possible présence de conscience pendant l'AC est intrigante et corrobore d'autres études récentes indiquant que la conscience peut être présente chez les patients, malgré des anomalies cliniques de conscience indétectable.

Tableau 2

Souvenirs des catégories 4 et 5 issus d'entretiens structurés.

Souvenirs de la catégorie 4

« Je suis revenu de l'autre côté de la vie… Dieu m'a renvoyé, ce n'était pas mon heure – j'avais beaucoup de choses à faire… J'ai traversé un tunnel vers une lumière très forte, qui n'a pas ébloui ni blessé mes yeux… Il y avait d'autres personnes dans le tunnel que je n'ai pas reconnues. En émergeant, j'ai décrit une très belle cité de cristal… Une rivière traversait la ville avec des eaux cristallines. De nombreuses personnes, sans visage, se lavaient dans l'eau… Les gens étaient très beaux… On entendait de magnifiques chants… et j'étais ému aux larmes. Mon souvenir suivant fut de lever les yeux vers un médecin effectuant des compressions thoraciques. » 

Souvenirs de catégorie 5 

Souvenir n° 1

(Avant l'arrêt cardiaque) « Je répondais (à l'infirmière), mais je sentais aussi une forte pression sur mon aine. Je sentais la pression, je ne ressentais pas la douleur ni rien de tel, juste une forte pression, comme si quelqu'un me poussait vraiment. Je parlais encore à (l'infirmière) et puis tout à coup, plus rien. J'ai dû (avoir un trou de mémoire)… mais ensuite, je me souviens très bien d'une voix automatique qui disait : « Choquez le patient, choquez le patient », et là-haut, dans un coin de la pièce, une femme me faisait signe… Je me souviens m'être dit : « Je ne peux pas monter là-haut »… elle me faisait signe… J'avais l'impression qu'elle me connaissait, que je pouvais lui faire confiance, et j'avais l'impression qu'elle était là pour une raison que je ne comprenais pas… et la seconde d'après, j'étais là-haut, regardant en bas. Je me suis tourné vers moi, l'infirmière et un autre homme chauve… Je ne voyais pas son visage, mais je voyais l'arrière de son corps. C'était un type plutôt trapu… Il portait une blouse bleue et un bonnet bleu, mais je voyais bien qu'il n'avait pas de cheveux, vu l'emplacement du bonnet.

Je me souviens ensuite de m'être réveillé sur le lit. Et (l'infirmière) m'a dit : « Oh, tu t'es endormi… tu es de retour. » Qu'elle ait prononcé ces mots, que cette voix automatique ait vraiment existé, je ne sais pas… Je me souviens d'avoir ressenti une certaine euphorie…

Je sais qui était (l'homme au bonnet bleu)… Je ne connaissais pas son nom complet, mais… c'était l'homme que… (j'ai vu) le lendemain… J'ai vu cet homme [venir me rendre visite] et je savais qui j'avais vu la veille. Post-scriptum – L'examen du dossier médical a confirmé l'utilisation du DAE, la présence de l'équipe médicale lors de l'arrêt cardiaque et le rôle joué par l'« homme » identifié dans la prise en charge de l'arrêt cardiaque. 

Souvenir n° 2

« Au début, je crois avoir entendu l'infirmière dire "composez le 444 arrêt cardiaque". J'ai eu peur. J'étais au plafond, regardant en bas. J'ai vu une infirmière que je ne connaissais pas auparavant, que j'ai vue après l'incident. Je pouvais voir mon corps et tout voir en même temps. J'ai vu ma tension artérielle être prise pendant que le médecin m'administrait un médicament. J'ai vu une infirmière pomper sur ma poitrine… J'ai vu des gaz du sang et des mesures de glycémie. »

Principaux thèmes cognitifs non liés aux EMI évoqués par les patients après un arrêt cardiaque.

Tableau 3

Peur

« J'étais terrifié. On m'a dit que j'allais mourir et le plus rapide a été de dire le dernier mot dont je me souvenais. »

« Être traîné dans l'eau profonde avec un gros anneau, et je déteste nager ; c'était horrible. »

« J'avais peur. »

Animaux et plantes

« Que des plantes, pas de fleurs. » « J'ai vu des lions et des tigres. »

Lumière intense

« Le soleil brillait. »

« Je me souviens avoir vu un éclair de lumière dorée. »

Famille

« Une dizaine de personnes ont parlé avec ma famille. Impossible de leur parler. » « Ma famille (fils, fille, gendre et femme) est venue. »

Être persécuté ou avoir subi des violences. »

« Être traîné dans l'eau profonde. »

« Tout cet événement semblait empreint de violence, et je ne suis pas un homme violent, c'était inhabituel. » J'ai dû subir une cérémonie et… la cérémonie consistait à être brûlé. Il y avait quatre hommes avec moi, et celui qui mentirait mourrait… J'ai vu des hommes dans des cercueils être enterrés debout.

Expériences de déjà-vu

« … J'ai eu une impression de déjà-vu et j'avais l'impression de savoir ce que les gens allaient faire avant même qu'ils ne le fassent après l'arrêt cardiaque. Cela a duré environ trois jours. »

Événements survenus après la récupération initiale d'un arrêt cardiaque

J'ai… « J'ai eu une dent qui est tombée lorsqu'on m'a retiré le tube de la bouche. »

Un apprentissage implicite sans rappel explicite a été par exemple démontré chez des patients présentant une conscience indétectable, tandis que d'autres ont démontré une conscience consciente pendant des états végétatifs persistants (EVP). La contribution relative de l'apprentissage implicite et de la mémoire dans l'EC étant inconnue, il reste difficile de savoir si les expériences remémorées reflètent la totalité des expériences des patients ou simplement la partie émergée d'un iceberg plus profond d'expériences non rappelées par la mémoire explicite. Il est intéressant de se demander si les patients peuvent avoir une activité consciente plus importante pendant l'EC (et si celle-ci et les expériences effrayantes peuvent avoir un impact sur la survenue d'un ESPT) que ce qui est mis en évidence par le rappel explicite, peut-être en raison de l'impact de l'inflammation cérébrale globale post-réanimation et/ou des sédatifs sur la consolidation et le rappel de la mémoire. Cependant, les résultats de cette étude et d'autres (décrits ci-dessus) soulèvent la possibilité que des évaluations supplémentaires soient nécessaires pour compléter les tests cliniques actuellement utilisés de conscience et de perception. Bien que l'étiologie de la conscience pendant l'AC soit inconnue, les résultats de notre étude, et en particulier notre cas vérifié d'AV, suggèrent qu'elle pourrait être différente de la conscience pendant l'anesthésie. 

Bien que certains chercheurs aient émis l'hypothèse d'une brève poussée d'activité électrique après l'arrêt cardiaque, contrairement à l'anesthésie, il n'y a généralement pas de fonction cérébrale mesurable dans les secondes qui suivent l'arrêt cardiaque. Cet état cérébral isoélectrique « plat » Français qui se produit avec l'apparition de l'AC se poursuit généralement tout au long de la RCP car le débit sanguin cérébral (DSC) est insuffisant pour répondre aux besoins métaboliques cérébraux pendant la RCP conventionnelle. Cependant, il a été estimé que notre patient est resté conscient pendant un certain nombre de minutes pendant l'AC. Bien que certains états de coma profond puissent conduire à une absence sélective d'activité électrique corticale en présence d'une activité cérébrale plus profonde,26 cela semble peu probable pendant l'AC car cette condition est associée à une hypoperfusion corticale globale plutôt que sélective, comme en témoigne la perte de la fonction du tronc cérébral. Français Ainsi, dans un modèle qui suppose une relation causale entre l'activité corticale et la conscience, la survenue de processus mentaux et la capacité à décrire avec précision les événements pendant un AC, comme cela s'est produit dans notre cas vérifié d'AV, lorsque la fonction cérébrale est généralement absente ou, au mieux, gravement altérée, sont déconcertantes. Ceci est particulièrement vrai car les réductions du DSC conduisent généralement à un délire suivi d'un coma, plutôt qu'à un état mental précis et lucide.

Malgré de nombreux rapports anecdotiques et des études récentes soutenant la survenue d'EMI et d'une possible AV pendant un AC, il s'agissait de la première étude à grande échelle à examiner la fréquence de la conscience, tout en tentant de corréler les déclarations d'AV des patients avec les événements survenus pendant un arrêt cardiaque. Bien que la faible incidence (2 %) de rappel explicite d'AV ait nui à notre capacité à utiliser des images pour examiner objectivement la validité d'affirmations spécifiques associées à l'AV, notre cas vérifié d'AV suggère néanmoins que la conscience peut survenir au-delà des 20 à 30 premières secondes après l'AC (lorsqu'une certaine activité électrique cérébrale résiduelle peut se produire)16 tout en fournissant une période de conscience quantifiable après que le cerveau atteigne normalement un état isoélectrique. Le cas indique que l'expérience s'est probablement produite pendant l'AC plutôt qu'après la récupération de l'AC ou avant l'AC. Aucun DSC ne serait attendu car, contrairement à la tachycardie ventriculaire, la FV est incompatible avec la contractilité cardiaque, en particulier après l'arrêt de la RCP pendant une vérification du rythme. Bien que des expériences similaires aient été classées en utilisant le terme scientifiquement indéfini et imprécis d'expériences hors du corps (OBE), et classées en outre comme autoscopie et illusions d'optique, notre étude suggère que l'AV et les expériences de perception pendant l'AC sont différentes de l'autoscopie puisque les patients n'ont pas décrit avoir vu leur propre double. 

De plus, comme les hallucinations font référence à des expériences qui ne correspondent pas à la réalité objective, nos résultats ne suggèrent pas que l'AV dans l'AC est susceptible d'être hallucinatoire ou illusoire puisque les souvenirs correspondent à des événements réels vérifiés. Nos résultats soulignent également les limites de la catégorisation des expériences liées à l'AC comme hallucinatoires, notamment parce que la réalité de l'expérience humaine n'est pas déterminée neurologiquement. Bien que des altérations de neuromodulateurs spécifiques impliqués dans les expériences « réelles » du quotidien puissent également conduire à des illusions ou des hallucinations, cela ne prouve ni ne réfute la réalité d'une expérience spécifique, qu'il s'agisse d'amour, d'EMI ou autre. En réalité, la réalité de toute expérience et le sens qui lui est associé sont déterminés socialement (plutôt que neurologiquement) par un processus social par lequel les humains déterminent et attribuent un sens aux phénomènes et aux expériences au sein d'une culture ou d'une société donnée (y compris les groupes et sociétés scientifiques).

Nos résultats permettent de mieux comprendre l'expérience mentale globale qui accompagne probablement la mort après un arrêt circulatoire. Comme la plupart des expériences des patients étaient incompatibles avec une EMI, le terme EMI, bien que couramment utilisé, peut être insuffisant pour décrire l'expérience associée aux processus biologiques de la mort après un arrêt circulatoire. Les recherches futures devraient se concentrer sur l'état mental des AC et son impact sur la vie des survivants, ainsi que sur son lien avec les déficits cognitifs, dont le TSPT. Nos données suggèrent également que l'expérience d'AC peut être distinguée du terme « EMI », qui présente de nombreuses limites scientifiques, notamment l'absence de définition physiologique universellement acceptée de l'« approche de la mort ». Cette imprécision pourrait contribuer à alimenter les divergences d'opinions persistantes au sein de la communauté scientifique sur le sujet.

Notre étude présentait plusieurs limites, notamment l'impossibilité de déterminer si la réponse des patients à la question sur les souvenirs pendant l'AC (catégorie 1) reflétait réellement une perception de souvenirs ou d'éventuelles difficultés à comprendre la question. Une autre limite était le nombre limité de patients ayant un souvenir explicite d'AC et dont les souvenirs auraient pu être analysés plus en détail. De plus, en raison de l'acuité et de la gravité de la maladie grave associée à l'AC, le délai d'entretien des patients n'était pas toujours le même pour tous, ce qui a pu introduire des biais (tels que des biais de rappel et des affabulations) dans les souvenirs. Français Bien que le pré-positionnement de cibles visuelles dans les zones de réanimation visant à tester l'AV était faisable d'un point de vue pratique (aucun incident indésirable n'a été signalé), l'observation que 78 % des événements d'AC ont eu lieu dans des zones sans étagères illustre la difficulté de tester objectivement les allégations d'AV dans l'AC en utilisant la méthodologie que nous proposons. 

Cela suggère également qu'une méthodologie différente et plus raffinée pourrait être nécessaire pour fournir une cible visuelle objective afin d'examiner le mécanisme de l'AV et la capacité perçue d'observer les événements pendant l'AC. Bien que dans cette étude le rôle potentiel de cofondateurs tels que l'âge, le sexe et le moment de l'entretien aient été évalués, nos résultats ont indiqué une grande variation de ces variables. Par conséquent, une étude plus vaste serait justifiée pour explorer plus en détail la relation entre ces variables et l'AV. Une telle étude devrait également explorer l'impact des variables qui peuvent avoir un impact sur la qualité du flux sanguin cérébral et la récupération cérébrale telles que la durée de l'AC, la qualité de la RCP pendant l'AC, la localisation de l'AC (à l'hôpital ou hors de l'hôpital), le rythme sous-jacent, le recours à l'hypothermie pendant l'AC et après le ROSC.

5. Conclusions

Les survivants d'un AC ressentent un large éventail de souvenirs après une réanimation cardio-pulmonaire, incluant des expériences de peur et de persécution, ainsi que des prises de conscience. Bien que le rappel explicite d'AV soit rare, il n'est pas certain que ces expériences contribuent à l'apparition ultérieure d'un TSPT. Des études sont également nécessaires pour définir le rôle des souvenirs explicites et implicites après un AC et l'impact de ce phénomène sur la survenue d'un TSPT et d'autres adaptations de vie chez les survivants d'un AC.

Références

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