De l'âne qui parle, à Jésus qui nous parle

29/04/2025

La Bible rapporte que le devin Balaam, au lieu de maudire les Israélites ainsi que le roi Balak lui avait ordonné, sera conduit par l'action du Seigneur à les bénir, renversant ainsi une situation épique, et ce grâce à une ânesse qui prend la parole ainsi que l'ange du Seigneur qui se met en travers de sa route (Nombres 22,21-34). L'âne, «instrument» des desseins de paix, d'amour et de service du Très Haut, s'illustre également dans la tradition de la crèche, dans le recensement de Marie et Joseph à Bethléem, dans la fuite de Marie et Joseph avec Jésus en Égypte, ou dans l'entrée de Jésus à Jérusalem durant la semaine de la Passion. Avant de devenir cheval blanc, monture de Jésus glorieux dans les cieux, par la Croix. Et nous passons par la Croix en avançant dans la foi comme un âne, humble et doux de coeur, bien que commettant des âneries comme tout pécheur.

Balaam apparaît dans la Bible au pays de Moab comme étant un devin habitant à Petor au service du roi Balak. Ce dernier s'oppose à l'arrivée des Hébreux craignant que leurs bêtes ne broutent toute l'herbe de ses terres. Balak sollicite alors l'aide du devin Balaam afin qu'il maudisse les nouveaux arrivants. Balaam avait été un homme de bien et un prophète de Dieu. Mais quoique se donnant encore pour un serviteur du Très-Haut, il avait renoncé à la piété pour s'adonner à la cupidité. Il n'ignorait pas que Dieu avait choisi Israël et que son devoir était de refuser les présents de Balak. Sa vénalité est excitée par la riche récompense et les honneurs qu'on lui promet. Il accepte donc les dons qu'on lui offre, et, tout en prétendant vouloir suivre strictement la volonté de Dieu, il cherche le moyen de satisfaire Balak.

Mais Balaam reçoit une vision de l'ange du Seigneur lui enjoignant de ne pas s'opposer au peuple béni par le Seigneur. Cependant, devant l'insistance des envoyés du roi, Balaam accepte finalement de partir et monte sur son ânesse à leur rencontre dans les steppes de Moab à la hauteur de Jéricho (Nb 22, 22-23) :

Mais, comme il partait, la colère de Dieu s'enflamma et l'ange du Seigneur se posta sur le chemin en adversaire, tandis qu'il s'en allait, monté sur son ânesse et accompagné de ses deux serviteurs. L'ânesse vit l'ange du Seigneur posté sur le chemin, son épée dégainée à la main ; elle quitta le chemin et prit par les champs. Balaam frappa l'ânesse pour la ramener sur le chemin.

La situation était périlleuse, car l'animal saisi de crainte à la vue de l'ange – invisible aux yeux de Balaam - refuse d'obéir à son maître ; celui-ci redouble alors ses coups sur sa pauvre monture finissant par se coucher sur lui. Balaam, ivre de colère, frappe de nouveau son ânesse qui se mit soudainement à lui parler :

Alors le Seigneur ouvrit la bouche de l'ânesse qui dit à Balaam : « Que t'ai-je fait pour que tu me frappes par trois fois ? » Et Balaam dit à l'ânesse : « C'est que tu t'es moquée de moi ! Ah ! si j'avais à la main une épée, à l'instant je te tuerais !

C'est alors que le Seigneur ouvrit les yeux de Balaam qui aperçut l'ange du Seigneur posté sur le chemin et comprit la raison de la peur de son ânesse. L'ange reprocha à Balaam d'avoir frappé par trois fois sa monture alors même qu'elle s'était détournée également trois fois de lui, ce que son maître n'avait pas fait. Ce dernier avoua alors humblement :

J'ai péché. Je ne savais pas que tu étais là, posté devant moi sur le chemin. Mais, maintenant, si c'est mal à tes yeux, je vais m'en retourner. Mais l'ange du Seigneur dit à Balaam : « Pars avec ces hommes ! Mais tu diras seulement ce que je te dirai de dire !

Une situation renversée

L'animal se trouve dans ce récit plus intelligent que son maître, plus voyant que son maître sensé être voyant de Dieu. Le monde animal a ici une perception plus fine que l'humanité. En ces temps bibliques, un âne – contrairement à notre époque – était un des biens les plus précieux et son image était loin d'être péjorative. La Bible souligne ainsi que l'ânesse de Balaam se trouve plus clairvoyante que son maître puisqu'ayant vu l'ange du Seigneur elle s'était écartée de lui par respect, ce que ne comprit pas Balaam. L'ânesse rejoindra ainsi l'âne de la crèche et surtout l'ânon sur lequel Jésus entra dans Jérusalem avant sa Passion, ces animaux témoignant de la sainteté du Seigneur parfois plus vite que les hommes…

Une histoire qui concerne aussi l'adoration. Adorer, ce n'est pas seulement aller à l'église, c'est suivre les instructions de Dieu dans tous les aspects de notre vie. Adorer, c'est obéir à Dieu, écouter sa voix, et dire ce qu'il veut que nous disions. Nous utilisons nos paroles et notre voix pour l'adorer.

Déjà la prophétie sur Jésus et l'âne dans la Genèse

"Juda, tu recevras les hommages de tes frères; Ta main sera sur la nuque de tes ennemis. Les fils de ton père se prosterneront devant toi. Juda est un jeune lion. Tu reviens du carnage, mon fils! Il ploie les genoux, il se couche comme un lion, Comme une lionne: qui le fera lever? Le sceptre ne s'éloignera point de Juda, ni le bâton souverain d'entre ses pieds, Jusqu'à ce que vienne le Schilo (Jésus), Et que les peuples lui obéissent. Il attache à la vigne (Israël spirituel et éternel) son âne, et au meilleur cep (Jésus - "Je suis le vrai cep" Jean 15,1-8) le petit de son ânesse. Il lave dans le vin son vêtement, et dans le sang des raisins son manteau. Il a les yeux rouges de vin, et les dents blanches de lait." (Genèse 49, 8-12 - "La vigne alors sera si répandue qu'il se permettra d'y attacher son âne", traduction Top Bible)

Pourquoi Juda, qui a pourtant vendu Joseph comme esclave et refusé des droits élémentaires à sa belle-fille, reçoit-il une telle bénédiction ? Son changement radical de comportement y est peut-être pour quelque chose (44, 33-34). Dieu l'a choisi pour qu'il soit l'ancêtre des rois d'Israël (d'où la mention du sceptre en 49, 10). De cette lignée naîtra le Messie promis, Jésus, qui entrera à Jérusalem la semaine de la Passion, dans un parallèle saisissant, sur un ânon et une ânesse (voir Matthieu 21:1-7 ; Jean 12:14-15) : 

"Quand ils s'approchaient de Jérusalem et qu'ils étaient venus à Bethphagé au mont des Oliviers, alors Jésus envoya deux disciples en leur disant :

— Allez au village qui est en face de vous. Aussitôt vous trouverez une ânesse liée et un ânon avec elle, en les détachant amenez-les-moi. Et si quelqu'un vous dit quelque chose vous direz : "Le Seigneur en a besoin, et aussitôt il les renverra."

Tout ceci arriva afin que soit accompli le mot dit par le prophète disant : "Dites à la fille de Sion : Voici que ton roi vient à toi doux et monté sur une ânesse et sur un ânon fils de bête de somme."

Les disciples allèrent et firent comme Jésus leur avait prescrit. Ils amenèrent l'ânesse et l'ânon, posèrent sur eux leurs manteaux et il s'assit au-dessus d'eux."

L'âne dans la tradition de la Crèche

L'âne, «instrument» des desseins du Très Haut, trouve confirmation dans le Nouveau Testament à l'occasion des Rameaux. On pense également que c'est sur cette monture que la sainte famille s'est faite recensée à Bethléem, puis s'est enfuie en Egypte, même si ce n'est pas dans la Bible. Toutefois, la mention de la « mangeoire » dans laquelle Jésus est déposé situe la scène dans un décor où le bœuf et l'âne auraient toute leur place (puisqu'une mangeoire est par définition un grand récipient où est déposée la nourriture destinée aux animaux). 

Mais pourquoi le bœuf et l'âne sont-ils parmi les personnages principaux des crèches de Noël ? La tradition populaire dit que l'haleine du bœuf et de l'âne servent à réchauffer le petit Jésus. Cela provient en réalité du Livre d'Isaïe, dans l'Ancien Testament.

Le bœuf connaît son possesseur ; et l'âne, la crèche de son maître : Israël ne connaît pas, mon peuple ne réfléchit pas. (Is 1,3)

Le prophète Isaïe reproche au peuple d'Israël de ne pas connaître ou reconnaître son Dieu — au contraire du bœuf et de l'âne qui, eux, connaissent leur maître. Pour les Pères de l'Église, le bœuf et l'âne représentent symboliquement le peuple humble qui reconnaît son sauveur et son Dieu dans ce petit enfant posé dans une mangeoire.

Mais on peut aussi avancer une seconde explication. Dans la traduction grecque de la Bible (la Septante), un court verset du prophète Habacuc dit :

Tu te manifesteras au milieu de deux animaux. (Ha 3,2 LXX)

Dès les premiers siècles de notre ère, les chrétiens ont donc interprété cette prophétie comme l'annonce de la naissance de Jésus. Finalement, c'est à partir de références issues d'Isaïe ou d'Habacuc que la tradition chrétienne a symboliquement associé le bœuf et l'âne au récit de la naissance de Jésus.

La Fuite en Égypte par Vittore Carpaccio (1500)


Marie et Joseph viennent à Bethléem pour se faire recenser (Lc 2, 1-7). Or, ils viennent de loin (de Nazareth, 150 km plus au nord). Les peintres et les artistes ont donc souvent représenté ce voyage avec Marie à dos d'âne — même si rien ne le dit explicitement dans le texte. Dans l'évangile de Matthieu, Le récit de la fuite en Égypte (Mt 2, 13-23) est également souvent représenté comme un voyage à dos d'âne — même si, une fois de plus, le texte de l'évangile n'en dit rien.

En fait, dans l'Ancien Testament, l'âne est l'animal royal par excellence. Ainsi, lors de son entrée à Jérusalem (fêtée lors du «dimanche des Rameaux»), Jésus arrive à dos d'âne, et ce détail fait écho à un passage prophétique du Livre de Zacharie qui annonce la venue du Messie sur une monture royale, alias à dos d'âne.

Il faut savoir lire les images qui peuplent nos imaginaires ou les tableaux de peintres inspirés par les Écritures, non pas pour les «débunker», mais pour savoir d'où viennent certaines traditions et comment elles pointent vers une vérité plus profonde. Ainsi, on pourra mieux apprécier les chefs-d'oeuvre, à l'image de ce tableau d'Aleksender Lauréus (ci-dessous) qui fait discrètement figurer trois personnages au second plan au fond à droit. L'âne au premier plan pointe vers le voyage qui commence ici, mais qui mènera Jésus jusqu'à sa passion.

L'entrée certaine de Jésus sur un âne à Jérusalem (Rameaux)

Mais il est certain que Jésus entre à Jérusalem sur un âne selon les Évangiles. Un épisode abondamment commenté par les exégètes, et qui revêt plusieurs interprétations possibles. Ainsi, le Christ monte l'animal aux longues oreilles, comme pour nous dire «que celui qui a des oreilles entende», pour entrer dans Jérusalem et y mourir. L'ânon, par sa petitesse, sa lenteur et sa fragilité, est un signe de l'humilité du Christ, note Jacques Rime. Le passage renvoie au prophète Zacharie qui annonçait: «Voici que ton roi s'avance vers toi; il est juste et victorieux, humble, monté sur un âne – sur un ânon tout jeune.» (Za 9,9) Une monture «dont le Seigneur a besoin», précise Jésus aux disciples qui s'en vont chercher l'animal. Ou les animaux, car le texte biblique pose question, et certains pensent que le Christ a pu être monté sur une ânesse accompagnée de son poulain.

Mais l'âne, alors que le cheval a été introduit tardivement en Palestine, a aussi longtemps été une monture de princes, utilisée pour la guerre. Dans le Livre des Juges, Déborah s'adresse aux puissants d'Israël en leur disant: «Vous qui montez des ânesses blanches, vous qui siégez sur des tapis, et vous qui marchez sur la route, parlez» (Jg 5,10) Pour l'abbé fribourgeois, l'entrée «asinesque» à Jérusalem a ainsi pu servir à souligner la royauté de Jésus.

L'entrée de Jésus à Jérusalem, par Pietro Lorenzetti, 1320

L'âne dans le dictionnaire biblique de Westphal

Nous lisons sous l'article « âne » que l'animal se dit en hébreu arôd, père, khamor, âthon, ayir ; et en grec, onos. La multiplicité des noms donnés à cet animal indique son importance dans la Bible.

Les deux premiers termes « arôd » et « père » concernent l'âne sauvage. Il a disparu de la Palestine et de son voisinage immédiat. On le retrouve dans l'Asie orientale et dans l'Asie centrale.

L'Arôd est mentionné deux fois. Dans Job 39,8, il est mis en parallèle avec « père ». Daniel 5,21 présente Nébucadnetsar frappé de folie, vivant parmi les ânes sauvages.

Le père est cité beaucoup plus souvent : Job 6,5 11,12 24,5 39,8-11, Esaïe 32,14, Jérémie 2,24 14,6 Osée 8,9 décrivent ses mœurs et relèvent son caractère farouche et indomptable, sa prédilection pour les pires solitudes. Dans Genèse 16,12, l'ange déclare à Agar qu'Ismaël sera semblable à un âne sauvage.

L'âne était l'antique monture des Hébreux, la monture de David et de ses ancêtres. L'importation des chevaux en Israël avait coïncidé avec les infidélités et le luxe ruineux de Salomon. Mettre sa confiance dans les chevaux, s'appuyer sur l'homme, renier Dieu, c'était tout un pour le rédacteur d'Esaïe 31,1, d'Osée 14,3 et de Michée 5,9). Aussi les prophètes devaient-ils représenter le Messie restaurateur des jours de piété et de gloire, comme un roi monté sur un âne. » (Westphal.)

L'âne était la monture qui convenait au Prince de la Paix. (cf. Matthieu 21,1 et parallèles). Avant l'introduction tardive du cheval dans l'Asie Antérieure et en Égypte (vers 2 500 av. J.- C), l'âne servait à la guerre. Les fouilles récentes d'Ur en Chaldée en font foi. La tombe n° 277 (vers 3 100 av. J.-C.) a livré des coquilles gravées ; sur l'une d'elles figure, en tête d'un cortège militaire, un roi suivi de son char attelé de quatre ânes.

L'Écriture évoque surtout l'âne domestique, descendant de l'âne sauvage. Le Guide de la faune et flore bibliques (par Jean Emériau, DDB) en donne une description détaillée. « Il est opiniâtre, parfois obstiné mais fort, patient, endurant et facile à nourrir, se contentant de chardons, d'herbes sèches et épineuses accompagnées de plantes aromatiques. Sa peau dure et coriace le protège du soleil. Durant sa vie relativement longue (de vingt-cinq à trente ans), il est de tous les travaux, de toutes les corvées, de tous les déplacements. » En temps de paix, il tourne la lourde meule, indispensable à la fabrication du pain. Apte aux labours, il est aussi capable de longs trajets sur des sentiers rocailleux – son sabot, creux en dessous et aux bords aigus, lui évite de glisser. Familier des paysages méditerranéens, où la population a toujours pris soin de lui, il est considéré comme un animal de prix dans la Bible, ainsi que comme une monture de prince.

L'âne du Messie

Les chrétiens connaissent bien l'image de Jésus monté sur un âne, lors de la fête des Rameaux - Matt 21 :5. C'est Jésus lui-même qui avait ordonné que ses disciples mettent à sa disposition un âne, "le petit d'une ânesse". En cela, il accomplissait les Ecritures, et Matthieu faisait simplement référence à l'AT – Zacharie 9/9 : "Sois transportée d'allégresse, fille de sion ! Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! Voici, ton roi vient à toi ; Il est juste et victorieux, Il est humble et monté sur un âne, le petit d'une ânesse".

Existe-t-il « l'âne du Messie », et pourquoi le Messie selon Zacharie doit-il monter un âne… est-ce symbolique ? Avec Moïse, il est question de « l'âne » (avec un article, non traduit dans la version Segond)… de même avec Abraham et Isaac. On le voit finalement traverser les temps bibliques – c'est un animal noble – et il aura sa gloire en étant la monture de Jésus lors des Rameaux, fête correspondant prophétiquement à Soukkot lorsque le Roi fera son entrée à Jérusalem. L'image qui en est donnée là est celle d'une entrée humble, « plein de douceur ». Ces qualités ne correspondent-elles pas aux caractéristiques de l'âne ?… En effet, Jésus est venu dans son « premier ministère » pour apporter la bonne nouvelle aux pauvres, pour guérir les cœurs brisés, proclamer aux captifs la délivrance, etc. Un ministère de consolation et de grâce, selon Esaïe 61 :1-2 et Luc 4 :19, « pour publier une année de grâce ».

L'âne, dans la Bible

L'âne est le compagnon de l'homme depuis les temps les plus anciens. À l'échelle de l'Histoire, l'âne demeure le second animal domestiqué mis au service du transport, après le bœuf. Jusqu'au VIème siècle avant notre ère, l'âne est un animal noble, la monture des princes et des rois avant d'être supplanté par le cheval.

La fuite en Egypte de Joseph et Marie atteste une nouvelle fois la proximité bénéfique de l'âne dans l'enfance de Jésus – il sera présent dans la crèche - il est le seul animal capable d'être patient et assez sobre pour supporter une longue traversée du désert. On trouve l'âne avec Abraham et Isaac, avec Moïse et sa famille, et avec Balaam, ayant là une disposition miraculeuse de la parole, et s'opposant à son maître face à l'Ange de l'Eternel. L'âne traverse la Bible, et il est présent à toutes les étapes du salut, montrant là une permanence de l'œuvre divine.

L'âne, matrice et tente protectrice

Le corps de l'âne est un espace refuge dans l'imaginaire des Kel-Tamasheq, celui des nomades touaregs. Dans la vie de ces gens de la langue touarègue, la nécessité de trouver un espace protecteur est fondamentale pour se prémunir de l'hostilité de l'espace environnant. Si la « tente » est l'abri essentiel, d'autres refuges sont possibles comme en témoigne la terminologie utilisée pour les désigner : ǎbatul et ebǎwel selon les parlers. Ainsi, dans deux contes touaregs, le corps de l'âne ajaḍ, animal à la mauvaise réputation dans la tradition, devient un abri pour cacher une jeune fille en quête d'un espace bienfaiteur. Le corps de l'âne est donc là un abri temporaire. Les notions de protection et de refuge sont associées au côté féminin et, particulièrement maternel. Le ventre tesa de l'ânesse est comme une matrice protectrice qui renvoie à la féminité et à la fécondité. (https://africanistes.revues.org/2586)

L'âne et la matière, dans la pensée juive

Le mot en hébreu pour âne est 'hamor - חמור ou חמר. Cette racine hébraïque nous parle également de la matière avec le terme 'Homer. Les commentaires juifs 'hassidiques ont vu là l'importance de ce symbolisme, en rapport à la Délivrance finale, au travers de Abraham, Moïse et le Messie. Lors de l'épisode de Moïse transportant sa famille, il est question de « l'âne », comme si cet animal était déjà connu (dans Segond, il est question « des ânes », au pluriel). Cet âne, nous le voyons avec Abraham et Isaac, et finalement avec le Messie, comme l'écrit Zach 9 :9. Le Mashia'h montant l'âne ('hamor) est interprété comme étant le spirituel dominant la matière ('homer). Ni Abraham ni Moïse n'avait chevauché l'âne, seul le Messie pouvait le faire, et c'était le signe de la Délivrance/Rédemption, le Messie étant Celui qui relie la matérialité et la spiritualité, faisant descendre le ciel sur la terre…

En tant que chrétiens, nous ne pouvons que nous associer à cette pensée, qui permet de comprendre au travers de l'incarnation, que le Messie « Fils de Dieu », est le lien par excellence entre le ciel et la terre, en vue du Royaume messianique sur terre – Il accomplira la parole du notre Père : « Que ton règne vienne, sur la terre comme au ciel », établissant un Règne de justice et de paix pour « mille ans », sur la terre.

Il attache à la vigne son âne

« Le sceptre ne s'éloignera point de Juda, ni le bâton souverain d'entre ses pieds, jusqu'à ce que vienne le Schilo, et que les peuples lui obéissent. Il attache à la vigne son âne, et au meilleur cep le petit de son ânesse » - Gen 49 :11. Il est intéressant de noter dans cette prophétie qui se rapporte au Messie/le Schilo, l'allusion à la fois à l'âne, à l'ânon et à l'ânesse - en hébreu 'hamor, 'ayir et 'athon (fort, solide, permanent). N'oublions pas que Jésus a demandé qu'on lui réserve un ânon, le petit d'une ânesse (Matt 21 :5, et Jn 12 :15). L'ânon est un âne qui n'a jamais été monté. Avec le Schilo, nous voyons ainsi que l'âne est encore lié au Rédempteur, issu de Juda.

Hypothèse : Israël, l'âne de Dieu

L'âne est le seul animal impur à avoir été racheté par un agneau – Ex 13 :13, et 34 :20 : « Tu rachèteras avec un agneau tout premier-né de l'âne ; et, si tu ne le rachètes pas, tu lui briseras la nuque ». Dans la pensée juive, l'âne représente le bien-être d'une maison, et sa richesse. Et celui qui ne consacre pas cette « richesse » ne peut pas en profiter, il « se brise la nuque ». Israël se doit d'être au service de Dieu, de la tâche que Dieu lui a assignée : « Car tu es un peuple saint pour l'Eternel, ton Dieu ; l'Eternel, ton Dieu, t'a choisi, pour que tu sois un peuple qui lui appartienne entre tous les peuples… ». S'il tombe dans l'idolâtrie, Israël devient ce peuple « à la nuque raide » - 'am-qashé-'oref. Le même principe s'applique au chrétien : il se doit de se mettre au service de Dieu, en tant que racheté de la mort spirituelle - « mort et vivant en Christ » (Héb 10 :19). Sa vie n'a de sens que dans la soumission au Maître et dans le service divin.

La qualité de l'âne est la patience, l'humilité et le service. Il est d'autre part soumis à son maître, c'est un animal de bât. Cependant, l'âne a une mauvaise réputation, étant têtu et revêche, et il est souvent maltraité et traité en bouc émissaire, tel Israël que le monde rejette.

Il n'empêche, c'est sur un âne que le Seigneur est entré à Jérusalem, accomplissant la parole de Zacharie. Le Seigneur de gloire a tenu à monter sur un âne en tant que Roi, lui redonnant la noblesse et la gloire que cet animal mérite. Le peuple juif a été errant durant 2000 ans au sein des nations, s'est rendu corvéable à merci, a été méprisé, et il est actuellement raillé de tous. Mais Israël est indispensable à tous, comme l'âne aux temps immémoriaux. Le monde a besoin d'Israël comme jamais, pour son inventivité, sa technologie, ses dons, son excellence, son énergie, sa foi.

Curieusement, le monde arabe, Ishmaël, est aussi symbolisé par un âne, mais un âne sauvage, en hébreu pere' : « Il sera comme un âne sauvage (onagre) ; il s'opposera à tous, et tous s'opposeront à lui… » - Gen 16 :12. Son origine est mélangé : Ishmaël est avant tout chamite (Cham) de par sa mère égyptienne Agar, et sémite par son père Abraham. Cet « âne sauvage » est en fait relié à l'islam, qui cherchera au travers le Djihad à « s'opposer » au monde entier… et aujourd'hui, le monde s'oppose à lui.

D'Abraham, cependant, Ishmaël possède l'aspiration à la perfection humaine. Dieu seul pourra dompter Ishmaël l'Egyptien, et le peuple arabe en général. Esaïe 19 en est la preuve : « Il les frappera, mais il les guérira ; et ils se tourneront vers l'Eternel, qui leur sera favorable, et Il les guérira » (22).

‭Apocalypse 19,11 : "Puis je vis le ciel ouvert, et voici, parut un cheval blanc. Celui qui le montait s'appelle Fidèle et Véritable, et il juge et combat avec justice."

Plus largement, chaque animal est une créature de Dieu

" Et Dieu dit : « Que la terre produise des êtres vivants selon leur espèce, bestiaux, bestioles et bêtes sauvages selon leur espèce. » Et ce fut ainsi. Dieu fit les bêtes sauvages selon leur espèce, les bestiaux selon leur espèce, et toutes les bestioles de la terre selon leur espèce. Et Dieu vit que cela était bon." (Genèse 1, 24-25)

"Tout le gibier des forêts m'appartient et le bétail des hauts pâturages. Je connais tous les oiseaux des montagnes ; les bêtes des champs sont à moi." (Psaume 49 (50), 10-11)

"Le loup habitera avec l'agneau, le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble, un petit garçon les conduira. La vache et l'ourse auront même pâture, leurs petits auront même gîte. Le lion, comme le bœuf, mangera du fourrage." (Esaïe 11, 6-7)

La création, et les créatures, nous parlent de Dieu

"Mais interroge donc le bétail, il t'instruira, l'oiseau du ciel, il te renseignera ; parle avec la terre, elle t'apprendra ; ils te raconteront, les poissons de la mer."(Job 12, 7-8)

"Regardez les oiseaux du ciel : ils ne font ni semailles ni moisson, ils n'amassent pas dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit. Vous-mêmes, ne valez-vous pas beaucoup plus qu'eux ?" (Matthieu 6, 26)

6 semaines pour la Création !

Dieu a donné à l'Homme une responsabilité envers les animaux

"Avec de la terre, le Seigneur Dieu modela toutes les bêtes des champs et tous les oiseaux du ciel, et il les amena vers l'homme pour voir quels noms il leur donnerait. C'étaient des êtres vivants, et l'homme donna un nom à chacun."(Genèse 2, 19)

"Le juste connaît les besoins de ses bêtes ; le méchant n'a que cruauté à la place du cœur !" (Proverbes 12, 10)

"De tout ce qui vit, tout ce qui est de chair, tu feras entrer dans l'arche un mâle et une femelle, pour qu'ils restent en vie avec toi. De chaque espèce d'oiseaux, de chaque espèce d'animaux domestiques, de chaque espèce de reptiles du sol, un couple t'accompagnera pour rester en vie." (Genèse 6, 19-20)

"Pendant six jours, tu feras ce que tu as à faire, mais, le septième jour, tu chômeras, afin que ton bœuf et ton âne se reposent, et que le fils de ta servante et l'immigré reprennent souffle." (Exode 23, 12)

Prendre soin des animaux avec l'aide de Dieu

Dieu a confié à l'Homme la création et les animaux qui la composent. Il nous montre ainsi la juste relation que nous devons entretenir avec le monde animal, notamment envers les animaux avec lesquels nous vivons. Que cela soit pour nous nourrir, nous aider dans notre travail ou pour nous tenir compagnie, nous devons les traiter avec respect et bienveillance.
Ni biens à exploiter, ni jouets, ni objets, ils reflètent une part du mystère de Dieu.

Nous pouvons faire bénir nos animaux lors de certaines messes organisées dans les paroisses et les confier à Dieu dans nos prières, notamment quand ils sont malades.


L'âne de Balaam : Nombres 22,21-34

Le lendemain matin, Balaam se leva, sella son ânesse et partit avec les dignitaires de Moab. Mais Dieu se mit en colère en le voyant partir, et l'ange du SEIGNEUR se posta sur le chemin pour lui barrer la route tandis qu'il cheminait, monté sur son ânesse, accompagné de ses deux serviteurs. L'ânesse vit l'ange du SEIGNEUR posté sur le chemin, l'épée nue à la main; quittant le chemin, elle prit par les champs. Balaam battit l'ânesse pour la ramener sur le chemin. L'ange du SEIGNEUR se plaça alors dans un chemin creux qui passait dans les vignes entre deux murettes. L'ânesse vit l'ange du SEIGNEUR : elle se serra contre le mur. Comme elle serrait le pied de Balaam contre le mur, il se remit à la battre. L'ange du SEIGNEUR les dépassa encore une fois pour se placer dans un passage étroit où il n'y avait pas la place d'obliquer ni à droite, ni à gauche. L'ânesse vit l'ange du SEIGNEUR; elle s'affaissa sous Balaam qui se mit en colère et la battit à coups de bâton. 

Le SEIGNEUR fit parler l'ânesse et elle dit à Balaam : « Que t'ai-je fait pour que tu me battes par trois fois? » – « C'est, lui dit Balaam, que tu en prends à ton aise avec moi! Si j'avais une épée en main, je te tuerais sur-le-champ! » L'ânesse dit à Balaam : « Ne suis-je pas ton ânesse, celle que tu montes depuis toujours? Est-ce mon habitude d'agir ainsi avec toi? » – « Non », dit-il. Le SEIGNEUR dessilla les yeux de Balaam, qui vit l'ange du SEIGNEUR posté sur le chemin, l'épée nue à la main; il s'inclina et se prosterna face contre terre. Alors l'ange du SEIGNEUR lui dit : « Pourquoi as-tu battu ton ânesse par trois fois? Tu le vois, c'est moi qui suis venu te barrer la route car, pour moi, c'est un voyage entrepris à la légère. L'ânesse m'a vu, elle, et par trois fois s'est écartée de moi. Si elle ne s'était pas écartée devant moi, je t'aurais tué sur-le-champ, tandis qu'à elle j'aurais laissé la vie sauve. » Balaam dit à l'ange du SEIGNEUR : « J'ai péché, car je n'ai pas reconnu que c'était toi qui étais posté là, devant moi, sur le chemin. Maintenant si ce voyage te déplaît, je m'en retournerai. »