L'univers infini du Dieu infini
Les photos prises par le télescope James Webb, mis en marche le 25 décembre 2021, repoussent les limites du l'univers observable, suggérant un univers infini à l'image de Dieu. "Dieu est dans les cieux, et les cieux sont partout où Dieu est." Le Dieu de l'univers serait donc aussi l'univers où Dieu est, omniprésent, omniscient et omnipotent. Le psaume 139 semble alors prendre tout son sens : Dieu est présent en tout lieu parce qu'il est le créateur des cieux et de la terre. Mais aussi parce qu'il est le créateur du temps, celui qui n'a ni commencement ni fin.
Dieu est le souverain, le principe et la fin de tout être. Il est le centre, la circonférence et la plénitude de toute chose. (...) Il est infini, mais fini à lui-même, parce qu'Il n'est et n'a rien hors de soi..." Pierre de Bérullle - Ô Toi, l'Au-delà de tout.

Le télescope spatial James Webb dévoile l'image la plus profonde de l'Univers Sorbonne Université 27 mai 2025
La Sagesse se meut d'un mouvement qui surpasse tous les autres ; elle traverse et pénètre toute chose à cause de sa pureté. Car elle est la respiration de la puissance de Dieu, l'émanation toute pure de la gloire du Souverain de l'univers ; aussi, rien de souillé ne peut l'atteindre. Elle est le rayonnement de la lumière éternelle, le miroir sans tâche de l'activité de Dieu, l'image de sa bonté. Comme elle est unique, elle peut tout; et, sans sortir d'elle-même, elle renouvelle l'univers." (Sagesse 7, 24-27)

Sur cette image – le champ ultraprofond du télescope Hubble – se trouvent 10 000 des galaxies les plus lointaines jamais observées par un télescope optique. (Sources : NASA/ESA/H. Teplitz et M. Rafelski (IPAC/Caltech), A. Koekemoer et Z. Levay (STScI), R. Windhorst (ASU).)
L'univers est-il infini ?
L'infini, c'est quoi ? La suite de nombres 1, 2, 3, 4, etc., est-elle infinie ? Si cette suite s'arrête, c'est qu'il y a un nombre plus grand que tous les autres. On peut donc transformer la question initiale en se demandant : y a-t-il un nombre plus grand que tous les autres ? La réponse est non, et se démontre en supposant qu'il y en a un, appelons le N, et en montrant qu'on aboutit à une contradiction. Il suffit d'ajouter 1 à ce nombre, et N + 1 est plus grand que N, ce qui est contradictoire avec l'hypothèse initiale. Donc la suite des nombres entiers est infinie.
Cet exemple est intéressant car il montre que l'esprit humain est capable d'imaginer une notion qui ne correspond à aucune observation. Dans tout ce que nous observons quotidiennement, nous ne rencontrons jamais l'infini : le nombre de lettres dans un livre, le nombre de livres dans une bibliothèque peuvent être grands, le nombre de grains de sable sur une plage très grand, mais ils ne sont pas infinis.

L'Univers est en expansion depuis au moins 13,7 milliards d'années
Revenons à présent à notre question initiale : la taille de l'univers. Bien avant que l'on sache mesurer la distance qui nous sépare des étoiles de galaxies lointaines, un philosophe du XVIe siècle, Giordano Bruno, imagina que l'univers devait être infini car, disait-il, « il n'est point de raison, convenance, possibilité, sens ou nature qui lui assigne une limite. » Et il rajoutait une image mentale permettant de se représenter cet infini : celle d'une ligne d'horizon qui donne l'impression que le paysage s'arrête là, or lorsqu'on avance, cette ligne d'horizon recule en découvrant de nouveaux paysages. L'Église italienne le condamna au bûcher pour de tels propos, mais c'est une autre histoire…
Aujourd'hui, nous obtenons des renseignements sur la taille de l'univers en observant la distribution des étoiles dans le ciel. Nous détectons la lumière qu'elles nous envoient, et de ses caractéristiques nous savons déduire leur distance à la Terre. Donc la taille de l'univers est au moins égale à cette distance, mais cela ne nous permet pas de savoir s'il est infini ou pas. C'est tout de même mieux que rien, et nous pouvons nous demander : aujourd'hui, quelle est la distance la plus grande que les astronomes aient mesurée ? Ou, si l'on préfère, quelle est la taille de l'univers observable aujourd'hui ?
Là, nous pouvons faire le lien avec une autre question : celle de l'expansion de l'univers. Nos connaissances actuelles permettent d'affirmer que l'univers est en expansion depuis au moins 13,7 milliards d'années, ce qu'on appelle le Big-Bang. C'est suffisant pour répondre à la question de la taille de l'univers observable.

Une sphère d'environ 100 milliards d'années-lumière de diamètre en expansion
Les physiciens ont identifié en 1965 le rayonnement électromagnétique dit « fossile », appelé aussi le « fond diffus de rayonnement cosmologique », un rayonnement émis peu de temps (300 000 ans) après le Big-Bang, lorsque se formèrent les premiers atomes. Lorsque nous détectons un photon de ce rayonnement fossile, il s'agit d'un photon émis il y a en gros 13,7 milliards d'années, n'est-ce pas ? Quelle distance parcourt la lumière pendant cet intervalle de temps ? 13,7 milliards d'années-lumière.
Mais comme l'univers est en expansion, l'objet céleste qui a émis ce photon se trouve aujourd'hui à une distance beaucoup plus grande. Pour la calculer, il faut une théorie de cette expansion. Dans le cadre du « modèle standard de la cosmologie » (le modèle théorique qui rend compte au mieux des observations de l'univers à grande échelle), on trouve 46,5 milliards d'années-lumière. Et comme le rayonnement fossile a les mêmes propriétés dans toutes les directions, la géométrie de cet univers observable est celle d'une sphère.
Nous pouvons à présent résumer notre connaissance actuelle : selon les meilleures théories dont nous disposons, l'univers observable est une sphère d'environ 100 milliards d'années-lumière de diamètre, et comme l'univers est en expansion, cette taille augmente en permanence.
En permanence ? En vrai, nous ne le savons pas. Mais si cette expansion ne s'arrête pas, c'est que le rayon de la sphère sera un jour plus grand que n'importe quel nombre pris à l'avance, non ?
Mais n'est-ce pas précisément ce que l'on entend par infini ?...
L'univers et Dieu : vertige de l'infini
L'univers, ''Dieu'', l'infini ? Depuis ses origines, l'humanité fait face à ces objets de pensée et les interroge avec acharnement. Certains disent que nos corps ne sont qu'une infime parcelle de l'univers, d'autres que nous sommes une image de ''Dieu''. D'une façon ou d'une autre, nous vivons immergés en eux, ils font partie de nous et peut-être faisons-nous partie d'eux. Un vertige nous saisit : au juste, que savons-nous d'eux, l'univers, ''Dieu'' et l'infini ?
Vertige devant la frontière
Et d'abord, l'univers a-t-il une frontière ? Y a-t-il une limite à l'immensité qui nous entoure ? Cette question, vieille comme l'humanité, se pose de façon toute nouvelle depuis la découverte, en 1927, du ''Big Bang'' par l'astrophysicien Georges Lemaître.
Avant le Big Bang il n'y avait rien que l'on sache. Après, il y a un univers qui dépend donc de celui qui l'a créé. Je dis « celui » car depuis un siècle, l'évidence s'est imposée qu'une intelligence créatrice seule a pu donner à l'univers les constantes qui lui ont permis d'évoluer jusqu'à nous.
Appelez-la ''Dieu'' si vous voulez : la nature de cette intelligence créatrice et la nature de l'univers sont intimement liés.
L'univers, donc. On sait aujourd'hui trois choses avec certitude : 1° qu'il a commencé par le Big Bang il y a 13,7 milliards d'années. 2° que depuis cet instant il connaît une expansion continue, organisée, et que la lumière suit cette expansion. Et enfin 3° que la vitesse de la lumière, mesurée au début du XXe siècle, est d'environ 1 milliard de km/heure.
Sachant cela, on peut poser la question des limites de l'univers en termes relativement simples : puisque la lumière apparaît au moment du Big Bang, que celui-ci s'est produit il y a 13,7 milliards d'années et que depuis lors la lumière franchit 1 milliard de km/heure, faites le calcul ; vous obtenez un nombre de km (c'est-à-dire la limite de l'univers) impressionnant. Mais votre calcul sera faux puisqu'au moment où vous l'aurez fait, la lumière aura encore franchi des millions de km. En repoussant toujours la limite de l'univers.
Cette limite, qu'on appelle l'horizon cosmologique, a donc ceci de particulier qu'elle se dilate et s'éloigne du centre à une allure vertigineuse – un peu comme un ballon d'enfant qu'on continuerait sans cesse à gonfler : il grossirait, mais à l'intérieur de son enveloppe.
Qu'y a-t-il au-delà de cette frontière, de l'autre côté de l'horizon cosmologique ? Il nous est impossible de le savoir. Et les hypothèses de multivers – d'univers multiples – sont des théories plus philosophiques que scientifiques.
Vertige devant l'univers
Alors, notre petit univers ? Petit puisque limité, mais infini puisque sa limite ne cesse de s'étendre à une vitesse fabuleuse, et nous ne savons pas vers quoi. Autrement dit nous savons que notre univers est là – puisque nous sommes là pour l'observer -, nous savons quand il a commencé mais nous ne savons pas comment, ni ce qu'il y avait avant, ni qui a déclenché ce commencement. Et nous savons qu'il a une limite, mais nous ne savons pas où la situer puisqu'elle ne cesse de fuir vers l'infini.
Un univers fini mais infini. Le vertige.
Et nous ? Les évènements que nous vivons, les objets que nous connaissons obéissent tous au principe de causalité qui est universel : tout vient d'une cause, qui a sa propre cause, etc. Universel aussi le principe d'impermanence : rien ne dure, rien ne disparaît, tout se transforme.
Or nous ne savons pas quelle est la cause du Big Bang, c'est-à-dire de l'univers. Ni s'il durera. Ni s'il disparaîtra ou se transformera (en quoi ?)
Autrement dit, malgré les récentes avancées de l'astrophysique, nous ne connaissons pas l'univers dans lequel nous vivons. Nous savons qu'il est là, c'est sûr. Mais nous ignorons ce qu'il est.
Vertige devant la connaissance d'un objet inconnaissable. Vertige devant cet univers connu, mais comme inconnu.
Vertige de ''Dieu'' ?
La nature de l'univers – quelque chose dont on sait qu'on n'en sait rien – fait irrésistiblement penser à l'autre interrogation de l'humanité : s'il y a un dieu (appelons comme ça le créateur du Big Bang), qui est-il ? Ou plutôt quel est-il ?
Au Ve siècle avant J.C., le Bouddha Siddhârta avait résolu la question en trois phrases : « Tout a une cause. SI l'univers a été créé par une cause, il faut chercher la cause de cette cause et on remonte ainsi à l'infini. Donc l'univers est incréé : il n'a pas de cause, pas de dieu, pas de créateur, il n'a ni commencement ni fin ».
Nous savons aujourd'hui que Siddhârta avait tort : l'univers a commencé voici 13,7 milliards d'années, et il aura une fin (1). Quelle est sa cause ? La réponse n'appartient pas au domaine de la science mais à celui des religions. Cette cause, elles l'appellent ''Dieu'' .
''Dieu'', pourquoi pas ? Mais en disant ''Dieu'', on soulève bien plus de questions qu'on n'obtient de réponses. Quel est ce ''Dieu''? Créateur, c'est sûr. Intelligence créatrice et même programmatrice, c'est sûr aussi : l'univers n'a pas évolué jusqu'à nous par hasard mais en suivant un programme d'une extraordinaire précision.
Ce ''Dieu'' a donc eu une intention personnelle en créant un univers, celui-là et pas un autre, dont l'évolution aboutit jusqu'à nous. Mais de ce créateur nous ne savons rien, sauf qu'il existe puisque nous sommes là. Tout comme l'univers, ''Dieu'' est connu comme inconnaissable. On sait tout de lui quand on sait qu'il a créé, mais on ne sait rien de ce qu'il est. Si on en reste là, c'est vertigineux.
Toutes les religions ont vu naître en leur sein des mystiques habités par ce vertige du Dieu connu comme inconnu. Ces hommes et ces femmes font l'expérience de l'inconnaissable. Est-ce une connaissance ? Oui, assurément. Cette connaissance révèle-t-elle la nature de ''Dieu'', comme la science le fait d'un de ses objets d'étude ? Non. Celui que les mystiques connaissent garde son mystère. Quand ils tentent (difficilement) de nous faire part de cette expérience vécue, ils emploient un vocabulaire nocturne : « Dans la nuit obscure – Oh ! quel bonheur ! – je ne voyais rien qu'une lumière pour me guider vers Celui que j'aimais » (2).
Nous sommes ici dans le domaine de la haute poésie, puisque le langage ordinaire est incapable de décrire cette expérience. Ils parlent de ténèbres de l'inconnaissance, de nuée lumineuse, de brise légère… Expérience exceptionnelle qui n'est pas donnée à tous.
C'est pourquoi en Israël, à partir du Ve siècle avant J.C., une lignée de prophètes a découvert une des facettes de la nature de ''Dieu'' : ils disent qu'il est amour. Et ils précisent qu'en disant cela, ils ne savent pas ce qu'ils disent : parce que nos amours à nous, les seuls que nous connaissions, sont fragiles, transitoires et souvent éphémères. Tandis que l'amour de ''Dieu'' pour nous est d'une telle puissance qu'il a créé l'univers (et nous dans l'univers).
''Dieu-amour'', cela recule les frontières de l'inconnu mais cela ne les supprime pas, puisque la nature créatrice de cet amour nous échappe.
Au 1er siècle le dernier des prophètes juifs, Jésus, a franchi un pas de plus. Il a donné à ce ''Dieu'' inconnaissable le nom d'Abba, c'est-à-dire ''père tendrement aimant / aimé''.
En le nommant ainsi, Jésus ne dit pas quel est ''Dieu'', comment il est fait. Il dit seulement quelle peut être notre relation avec lui : non pas la crainte ou l'éloignement, mais l'intimité confiante des petits enfants avec leur père chéri.
Et il affirme que ce père a engendré l'univers dans un acte d'amour. Par amour et pour l'amour.
''Dieu'' connu comme inconnu ? Oui, tant que l'amour n'aura pas vaincu les forces du mal à l'œuvre dans l'univers.
1/ Dieu est infini par rapport à lui-même.
C'est ce que l'on peut appeler la perfection absolue de Dieu. Tout ce que Dieu a est à lui et tout ce que Dieu est, il l'est ad infinitum (à l'infini). Il possède l'amour, la grâce et la souveraineté, non pas dans une large mesure, ni principalement, ni partiellement, mais dans une mesure infinie. Sa grandeur est insondable (Psaumes 145:3). Sa puissance et sa perfection sont illimitées. Dieu agit comme il veut, et personne ne peut contrecarrer ses plans ou ses desseins. « Eternel, Dieu de nos ancêtres, n'est-ce pas toi qui es Dieu dans le ciel et n'est-ce pas toi qui domines sur tous les royaumes des nations ? N'est-ce pas toi qui détiens la force et la puissance, toi à qui personne ne peut résister ? » (2 Chroniques 20:6). Les nations sont comme une goutte d'eau dans un seau (Ésaïe 40:15). Le psaume 115:3 affirme que « Notre Dieu est au ciel, il fait tout ce qu'il veut » (Psaume 115:3).
2/ Dieu est infini par rapport au temps
On peut appeler cela l'éternité de Dieu. Il est sans commencement ni fin (Psaume 90:2 ; 1 Timothée 1:17). Contrairement à toutes les choses créées, Dieu n'a ni origine ni point de départ. Il n'y a jamais eu de moment où Dieu n'existait pas. Dieu a toujours été Dieu et a toujours existé, même avant l'existence de la matière, de l'univers ou du temps tel que nous le concevons. Notre Dieu est Jehovan El Olam, le Dieu éternel (Genèse 21:33).
3/ Dieu est infini par rapport à l'espace
Nous pouvons appeler cela l'immensité de Dieu. Il n'est pas limité par la physique ou la situation géographique. Le Dieu qui a fait tout ce qui est dans les cieux et sur la terre ne vit pas dans des temples faits de main d'homme (Actes 17:24). « Suis-je un Dieu qui ne considère que les réalités proches, déclare l'Eternel, ne suis-je pas un Dieu qui voit aussi de plus loin ? Quelqu'un pourrait-il se dissimuler dans des cachettes sans que moi, je ne le voie ? déclare l'Eternel. Est-ce que je ne remplis pas le ciel et la terre ? déclare l'Eternel. » (Jérémie 23:23-24). Même le ciel et les cieux les plus élevés ne peuvent contenir Dieu (1 Rois 8:27). Alors que l'omniprésence suggère que Dieu remplit de son être toutes les parties de l'espace (Ephésiens 1:23), l'attribut de l'immensité souligne que l'être de Dieu n'est soumis à aucune limite. Le premier attribut souligne l'immanence de Dieu, tandis que le second met l'accent sur sa transcendance. Il n'y a aucun endroit où Dieu n'est pas et aucun moyen de contenir Dieu – que ce soit par l'imperfection, par le temps ou par l'espace.